Conférences à l’université Sverdlov sur la libération des femmes
Alexandra Kollontaï
XI° conférence
La dictature du prolétariat : conditions de travail et dispositions sur la protection du travail
Lors de la dernière conférence, nous avons esquissé le nouveau mode de production en train de naître sous la dictature du prolétariat. Après avoir analysé la place qu’occupe le travail obligatoire pour tous dans le processus de libération de la femme dans notre république ouvrière, nous allons aujourd’hui nous attarder davantage sur le travail des femmes. Puis nous examinerons en détail quelles seront les nouvelles conditions de vie quand l’économie individuelle familiale sera remplacée par les cantines publiques, l’éducation prise en charge par l’État et que seront appliquées les lois sur la protection maternelle.
En Russie, avant la Révolution, vivaient environ cinq millions de femmes exerçant une activité professionnelle. Ce chiffre paraît élevé ; il ne représente cependant que 8 % de l’ensemble de la population féminine russe de l’époque.
Lors de la Première Guerre mondiale, le nombre des travailleurs augmenta rapidement. Déjà, en 1914, la participation des femmes dans l’industrie se monta à 32 % pour atteindre 40 % en 1918. En 1918, 40 % de la population active – ouvriers et employés salariés – étaient des femmes. Une statistique extrêmement incomplète du Conseil central des syndicats de toutes les Russies permet de supposer qu’il y avait à la fin de l’année 1921 environ deux millions de femmes employées dans l’industrie et les transports. (Celle statistique prend en considération les ouvrières agricoles, mais ignore les paysannes indépendantes.) Dans six secteurs professionnels et leurs syndicats correspondants, les femmes détiennent la majorité. Les cantines publiques emploient 74,5 % de femmes, les ateliers de couture 74,2 %, l’industrie du tabac 73,5 %, les secteurs « artistiques » 71,4 %, la santé publique 62,6 % et l’industrie textile 58,8 %. Dans le commerce et chez les particuliers, les jeunes forment 53,2 % du personnel. La plupart des femmes travaillent donc dans les industries textiles, la santé et les transports publics, les ateliers de couture, l’administration publique, l’industrie métallurgique, les métiers artistiques, dans les écoles et les comités de propagande.
Dans six secteurs de production, les femmes l’emportent aujourd’hui sur les hommes, et, dans dix autres secteurs, la participation des femmes se monte de 25 à 50 % de l’ensemble du personnel. Le travail des femmes a donc cessé d’être une exception, mais en dépit de ce fait il faut reconnaître que la participation des femmes dans l’administration économique, les comités d’entreprise et les conseils économiques d’État reste cependant particulièrement réduite.
La conscience et les mœurs traditionnelles ne peuvent apparemment pas suivre les énormes changements dont nous sommes aujourd’hui témoins. Désormais, le travail des femmes est devenu partie constituante de l’économie nationale. Ce n’est qu’avec la participation des femmes que nous pouvons envisager une élévation de la production. II ne doit plus y avoir de parasites, c’est là le principe sur lequel nous construisons tout notre système social. Et nous comptons parmi ces parasites les femmes entretenues, que ce soit de façon légale, comme épouses, ou illégale, comme prostituées. Mais le préjugé sur l’infériorité de la femme est resté si solidement ancré dans les esprits que même en Union soviétique, où l’égalité juridique de l’homme et de la femme a été réalisée, où les femmes participent activement à tous les secteurs sociaux, où elles combattent aux côtés de l’Armée Rouge, il continue toujours à entamer la confiance en soi de la femme. Je vais illustrer ce fait par le tableau suivant :
Participation des femmes sur l’ensemble des membres syndiqués et participation des femmes dans les comités d’Entreprise
Syndicat |
% de femmes syndiquées |
% de femmes comités d’entreprise |
Alimentation publique (cantines) |
73.5 % |
30.9 % |
Imprimerie |
33,3 % |
9.6 % |
Couture-confection |
69,1 % |
25,7 % |
Journalisme |
32,5 % |
13.2 % |
Tabac |
67,8 % |
36,6 % |
Kolkhozes |
22,5 % |
8,1 %, |
Education sociale |
65.2 % |
37,7 % |
Ouvriers agricoles et forestiers |
19,8 % |
6,2 % |
Textile |
60.1 % |
9,3 % |
Industrie alimentaire |
18.3 % |
4,3 % |
Médecine et santé |
52,7 % |
20,2 % |
Métallurgie |
16,6 % |
1,8 % |
Métiers d’art |
39,3 % |
9,2 % |
Industrie du bois |
16,4 % |
5.5 % |
Chimie |
35.6 % |
3,6 % |
Transports |
14,5 % |
5,0 % |
Papeterie |
34,3 % |
10.1 % |
Industrie du cuir |
13,8 % |
2.7 % |
Services publics (Soviets) |
34,3 % |
11,4 % |
Industrie du bâtiment |
11,8 % |
2,9 % |
Dans les industries du textile, par exemple, la participation absolue et relative du travail des femmes est très importante. Mais, sur les 194 membres de l’organe dirigeant des travailleurs du textile dans 38 gouvernements de Russie, il n’y a que 10 ouvrières. Dans les comités d’entreprise des usines du textile, la participation des femmes reste toujours une exception.
C’est surtout le cas depuis la mise en place d’inspecteurs d’entreprise responsables. La collaboration d’une femme à l’intérieur d’une administration principale ou centrale reste tout à fait inhabituelle. Au VIII° Congrès du Parti communiste de Russie, en mars 1919, la section féminine du Comité central adopta une résolution dans laquelle elle réclama que les ouvrières et les paysannes participent à tous les conseils de l’économie nationale, soit à tous les secteurs de production. Cette résolution se heurta auprès des délégués du congrès à de fortes résistances et ne fut adoptée qu’après l’intervention patiente mais énergique de la camarade Samoilov et de moi-même.
Pour parler franchement, nous sommes partiellement responsables si les femmes sont si peu représentées aujourd’hui dans les administrations principales et centrales. Dans les premiers temps après la Révolution, les sections féminines concentrèrent essentiellement leur travail sur la participation des femmes aux conseils locaux. Nous étions alors particulièrement attirées par les conseils créant les conditions pour la libération de la femme et allégeant leur vie quotidienne. Surtout dans les domaines de l’éducation, les cantines publiques et la protection maternelle. Depuis l’automne 1920, le centre de gravité de notre lutte s’est déplacé. Nous sommes optimistes, et avec raison, car nos sections féminines ont axé leur propagande sur une participation plus importante des femmes dans la reconstruction de i’industrie, et nous sommes fermement persuadés que la participation active des ouvrières et des paysannes à l’édification du nouveau mode de production augmentera rapidement. Néanmoins, nous allons retourner aux problèmes qui sont apparus avec le travail des femmes en Union soviétique. Quelles sont finalement les conditions de travail dans la première république ouvrière de l’histoire de l’humanité, dans ce champ expérimental où commence à lever la semence de la future société communiste ?
Bien que la femme, tout comme l’homme, ait été obligée depuis le Moyen Age à trouver un emploi sur le marché du travail, la femme était bien moins payée que l’homme. C’est pourquoi nous allons nous occuper maintenant de la question du salaire des femmes. Depuis le milieu du XIX° siècle, féministes bourgeoises et prolétaires conscientes de la lutte des classes soutenaient la même revendication : « A travail égal, salaire égal », mais cette revendication ne pouvait pas aboutir dans une société de type capitaliste.
Ce développement peut être compris comme suit : la classe ouvrière organisée était certainement capable d’imposer cette revendication à des secteurs de production particuliers, mais à la même période une main-d’œuvre féminine nouvelle et syndicalement inorganisée afflua de façon ininterrompue sur le marché du travail. Ce qui conduisit en règle générale à un abaissement relatif des salaires des femmes dans tout le pays. Cette inégalité, qu’il n’est pas possible d’aplanir sous le capitalisme, fut levée dans la république des Soviets immédiatement après la Révolution. Dès lors, l’appartenance à un sexe déterminé ne doit plus jouer sur le montant des salaires. Dans tous les secteurs de production, dans les transports, l’agriculture ou les services publics, les accords tarifaires sont conclus entre le syndicat local et le Conseil central des syndicats de toutes les Russies. Le montant du salaire est donc dépendant du type de travail effectué, et les critères pour les différentes catégories de travail sont, par exemple, la formation professionnelle acquise, les degrés de risques d’accidents, de difficulté, etc.
L’offre et la demande cessent ainsi de déterminer le montant des salaires. Le salaire n’est plus le résultat de luttes salariales, syndicats contre entrepreneurs. Aujourd’hui, il a cessé d’être une loterie et il est fixé par les travailleurs eux-mêmes. Les tarifs acceptés par le Conseil central des syndicats de toutes les Russies sont applicables à toutes les entreprises des secteurs concernés, et cela sur l’ensemble de la république ouvrière.
Une enquête effectuée parmi les travailleurs de Moscou nous montre que le revenu moyen des jeunes travailleuses au-dessous de dix-huit ans atteint ou même dépasse dans plusieurs secteurs le revenu moyen des jeunes travailleurs au-dessous de dix-huit ans. Le tableau suivant nous montre les salaires moyens réglementés par les accords tarifaires pour plusieurs secteurs de production :
Secteur de production |
Travailleurs |
Travailleuses |
Industrie chimique |
6,2 |
7,1 |
Industrie du tabac |
4,3 |
5,7 |
Kolkhozes |
6,3 |
5,0 |
Santé publique |
2,8 |
5,1 |
Industrie textile |
3,7 |
4,1 |
Cantines publiques |
3,5 |
3,2 |
Si nous comparons les tarifs des salaires des travailleurs et des travailleuses, nous avons l’impression que ce sont les travailleuses qui l’emportent. Cependant, la même enquête montre aussi que le salaire moyen de toutes les femmes est de moitié du salaire moyen des travailleurs masculins. Cette inégalité des salaires s’explique par le fait que dans notre république des Soviets, le contingent des ouvrières non qualifiées est plus important que celui des ouvriers non qualifiés. Tant que l’on continue à négliger la formation des femmes, le beau principe de notre république ouvrière : « A travail égal, salaire égal », restera lettre morte.
Après la révolution d’Octobre, le Conseil supérieur de l’économie nationale cherchait à payer les salaires non pas en argent, mais en nature. En plus du salaire réglé principalement en argent, le travailleur ne recevait pas seulement la ration alimentaire normale à laquelle tout citoyen soviétique avait droit grâce à son livret de travail, mais touchait également des suppléments en nature sous forme de bois de chauffage, de pétrole, de vêtements de travail, de repas à la cantine et de logement. Pour ces suppléments, il n’avait généralement rien à payer ou payait un prix fixé par le soviet local.
Après un nouveau changement d’orientation du Conseil pour le travail et la défense et une nouvelle organisation économique, nous allons passer également à un autre système salarial. Mais je vais m’arrêter auparavant à la rémunération en nature, telle qu’elle a été pratiquée lors des premières années après la Révolution. Cette économie naturelle a été une tentative importante pour relier organiquement le secteur de production au secteur de consommation et combler ainsi la faille béante qui avait été ouverte par le système capitaliste entre les deux secteurs. Si cette économie naturelle avait pu être pour. suivie, le commerce, comme conquête capitaliste, serait devenu superflu et condamné à disparaître. Malheureusement, nous ne pouvons plus poursuivre cette expérience hardie et historiquement si importante. Notre grande pauvreté, la crise de notre industrie et notre isolement complet du marché mondial nous obligent aujourd’hui à renoncer à réorganiser le fondement de notre économie nationale. Mais la rémunération en nature comme l’aménagement des cantines sont des modes de rétribution qui sont, en principe, également envisageables dans un système d’économie capitaliste. Si ces formes de paiement peuvent élever temporairement la productivité du travail, elles ne peuvent à elles seules conduire à l’édification d’un nouveau mode de production.
Les taux de salaires en vigueur actuellement sont-ils satisfaisants pour les travailleuses ? Bien sûr que non. Le ravitaillement de la population dans la Russie soviétique laisse encore à désirer. Il arrive toujours que les fournitures en nature arrivent en quantités insuffisantes ou en retard. Par ailleurs, il n’y a pas de pénurie en textiles, et le bois de chauffage ainsi que le pétrole sont attribués souvent plus rapidement aux consommateurs individuels qu’aux entreprises. Mais les travailleurs sont toujours obligés d’acquérir des marchandises au marché noir. Et les prix en hausse constante les mettent dans une situation difficile. Les difficultés que les travailleurs rencontrent encore dans la réalité leur masquent les impressionnantes conquêtes de la Révolution. En revanche, ces conquêtes ne sont pas non plus remises en question par la classe ouvrière. Si l’on proposait aux ouvriers un retour à la période du capitalisme, très peu seraient sans doute prêts à abandonner l’avenir et à réintégrer le passé bourgeois.
Pour avoir une idée d’ensemble sur la situation des femmes sous la dictature du prolétariat, nous analyserons maintenant les réglementations générales sur la protection du travail en Russie soviétique. La conquête la plus importante de la Révolution pour les travailleurs et les travailleuses fut naturellement la journée des huit heures. Au cas où le développement des forces productives ne permet pas l’introduction du système des 3 x 8 (où trois équipes travaillent par roulement toutes les huit heures), la durée de la semaine de travail ne doit cependant pas dépasser quarante-huit heures. Dans les secteurs particulièrement insalubres, par exemple dans les industries du tabac et dans certaines usines chimiques, la durée journalière du travail est ramenée à six ou sept heures maximales. Le travail de nuit est interdit aux femmes, et il est limité à sept heures pour les hommes. Le travail de bureau pour les employés et les intellectuels est fixé à six heures par jour. La pause de midi doit avoir une durée d’une demi-heure à deux heures. Chaque travailleur a droit à un repos hebdomadaire de quarante-deux heures au minimum sans interruption. Le congé annuel est de quatre semaines pour un an, de deux semaines pour six mois. L’emploi des jeunes au-dessous de seize ans est interdit et ceux qui ont entre seize et dix-huit ans ne doivent pas travailler plus de six heures par jour.
Dans la pratique, ces instructions ne sont malheureusement pas toujours respectées. Pendant les années fébriles de la guerre civile, on était souvent obligé d’y déroger. Il fallut souvent exécuter intensivement certains travaux nécessaires à la défense. La durée du congé des travailleurs masculins fut réduite à deux semaines, au lieu de quatre, le nombre des heures supplémentaires et le travail de nuit augmentèrent sans cesse et les jeunes de quatorze à seize ans furent autorisés à travailler quatre heures par jour. Le commissariat du Travail ordonna, le 4 octobre 1919, une réglementation spéciale qui stipule que le travail de nuit peut être autorisé aux femmes dans certains secteurs de l’industrie avec un accord préalable entre le syndicat et la commission pour la protection du travail. Mais pour les femmes enceintes et les femmes allaitant leur enfant, le travail de nuit demeure interdit.
Les lois du travail soviétiques protègent les femmes. Heures supplémentaires, travail de nuit et travail féminin dans les mines sont interdits. Mais, à cause de l’importante pénurie de main-d’œuvre et de la nécessité d’utiliser toutes les forces disponibles dans le processus de production, ces prescriptions ne sont en général pas suivies.
Des réglementations particulières spécifient que les femmes ne doivent pas exécuter des travaux « au-dessus de leurs forces » ni de travaux nuisibles à leur santé dans certains secteurs de production. Par exemple, l’une de ces réglementations interdit aux femmes l’accès à des travaux où il est nécessaire de soulever des charges dépassant dix livres. Mais toutes ces instructions de travail pour nos hommes et nos femmes demeurent le plus souvent lettre morte. Au départ, nos délégués ouvriers et paysans veillaient à l’application stricte de ces instructions. Mais la situation chaotique de notre économie nationale et la pénurie de main-d’œuvre ne permirent pas cette mise en application. Tandis que dans les États capitalistes règne un chômage endémique, notre république ouvrière souffre en permanence d’un manque de main-d’œuvre.
Une protection du travail adéquate et appliquée supposerait dans nos entreprises et nos ateliers des installations sanitaires appropriées. Par exemple, l’installation de dispositifs d’aération, du chauffage central et de canalisations qui réclament une main-d’œuvre qualifiée, des matériaux de construction et un savoir technique qui manquent actuellement à notre pauvre république ouvrière. Il est extrêmement difficile d’augmenter l’intensité du travail dans des conditions d’hygiène insupportables et, à la fois, de protéger efficacement la vie et la santé des prolétaires. Notre république ouvrière ne peut donc pas encore se vanter d’une protection générale du travail satisfaisante, mais elle peut cependant être fière de sa législation sociale dans le domaine de la protection maternelle et de l’assistance aux nourrissons.
Dans ce secteur, nous avons non seulement largement dépassé les pays jusque-là les plus progressistes, mais nous avons même été au-delà des revendications les plus radicales des socialistes. La résolution complète et programmée à la base des lois sur la protection maternelle a été adoptée au I° Congrès des travailleuses de toutes les Russies, du mois de novembre 1919. L’idée fondamentale de cette loi est la suivante : seules les femmes exerçant une activité professionnelle ont droit à la protection maternelle de l’État, les femmes, donc, qui ne vivent pas de l’exploitation d’autres forces de travail. L’État assure seize semaines de congé de maternité à toutes les femmes accomplissant un travail manuel. Les femmes ayant un emploi bureaucratique ou intellectuel obtiennent douze semaines de congé de maternité. Le montant de la prime de congé de maternité est calculé en fonction du salaire global, y compris les primes de salaire et les heures supplémentaires. Naturellement, les épouses des travailleurs touchent également une prime de l’État, calculée en fonction du revenu local moyen. En novembre 1920, le commissariat du Travail émit par ailleurs un décret assimilant les employés exécutant un travail particulièrement pénible au groupe des ouvrières de l’industrie. Téléphonistes, sténotypistes, doctoresses, infirmières, etc., ont également droit aux seize semaines de congé de maternité payées. Un décret ultérieur de novembre 1920 assure aux femmes enceintes et aux mères la conservation de leurs rations de vivres et de bois de chauffage pendant leur congé.
Les mères allaitant leur enfant touchent une allocation financière supplémentaire pendant les neuf premiers mois après la naissance. Cette subvention d’allaitement correspond à la moitié du salaire minimal local. De surcroît, chaque mère a droit à des articles pour bébé et à environ dix mètres d’étoffe. Malgré la grande pénurie, la république ouvrière se préoccupe des mères et des nourrissons. Dernièrement, la section de la protection maternelle et de l’assistance aux nourrissons a distribué aux mères des vêtements pour bébé. La loi sur la protection du travail stipule que les mères allaitant leur enfant ne sont pas obligées de travailler dans une localité située à plus de deux verstes de leur domicile.
Nous avons établi une ration unique pour tous les travailleurs. Ce qui signifie que des sections armées de travailleurs réquisitionnent les réserves de nourriture à la campagne, et ces vivres sont distribuées ensuite aux travailleurs selon le système des cartes de ravitaillement.
Le coût de cette protection maternelle s’élevait à plus de 34 milliards de roubles pour l’année 1920. Le camarade Lebedjev a fait remarquer avec raison qu’une telle assistance de la part de l’État, n’était possible que sous la dictature du prolétariat, car la classe ouvrière est naturellement intéressée au bonheur des générations futures, et cela déjà tout simplement parce que ces générations s’emploieront à construire la future société communiste.
La protection de la maternité est, sur le plan social, la plus grande conquête de la Révolution. Cette initiative ne facilite pas seulement l’accès des femmes à la collectivité, mais facilite aussi la tâche naturelle de la femme dans la société, c’est-à-dire la maternité.
Nous allons clore ici notre exposé des lois générales sur la protection du travail des femmes dans notre actuelle république ouvrière. Résumons-nous une dernière fois. Par l’introduction du travail obligatoire pour tous, le travail des femmes dans la république des Soviets a acquis une position déterminante à long terme. Dès aujourd’hui, le travail des femmes dans l’industrie joue un rôle important. Elles sont deux millions d’ouvrières sur six millions d’ouvriers. Elles forment donc un tiers des effectifs de l’industrie, des transports, des communautés agricoles et kolkhozes et des services publics (bureaux des soviets locaux). Le gouvernement des Soviets a réalisé le principe : « A travail égal, salaire égal » , mais le manque de qualification professionnelle des travailleuses a malheureusement conduit au fait que la majorité des femmes dans notre république continuent dans les premières années après la Révolution à exécuter des travaux non qualifiés et mal payés. Cette expérience doit servir maintenant aux partis communistes des États capitalistes, en particulier à leurs organisations de jeunesse.
La question de la qualification professionnelle de la jeunesse ouvrière, tant masculine que féminine, doit être soigneusement prise en considération par le parti. Car, à la période de la dictature du prolétariat, une formation professionnelle poussée bénéficie aux travailleuses comme à l’économie socialiste nationale. En Russie soviétique, la protection légale du travail n’est pas satisfaisante, mais nous assurons cependant de façon importante la protection du travail des femmes et la protection maternelle. La tentative de rémunération en nature fut révolutionnaire ; nous dûmes cependant interrompre cette expérience. Mais, grâce aux expériences des premières années de la Révolution, nous sommes persuadés qu’une telle initiative politique et économique dans des conditions différentes peut être parfaitement réalisable.
C’est ainsi que nous terminerons notre conférence aujourd’hui.