Le développement du capitalisme en Russie
Lénine
Chapitre V : LES PREMIÈRES PHASES DU CAPITALISME DANS L’INDUSTRIE
VII. « LA PETITE INDUSTRIE ET L’AGRICULTURE »
C’est là un titre de chapitre que l’on rencontre très souvent dans les descriptions des petites industries paysannes. Quand le capitalisme en est au stade primitif qui nous intéresse et que l’artisan se différencie à peine du paysan, les liens qui le rattachent à la terre constituent un phénomène extrêmement caractéristique qui nécessite une étude à part.
Pour définir l’exploitation agricole des «koustaris», commençons par examiner notre tableau (voir annexe 1), qui nous indique tout d’abord quel est le chiffre moyen des chevaux dans chacun des groupes de producteurs. Si on réunit les 19 métiers pour lesquels ces chiffres nous sont fournis, on obtient la moyenne générale de 1,4 cheval par artisan (patron ou petit patron), soit 1,1 dans le groupe I, 1,5 dans le groupe II et 2,0 dans le groupe III. On voit que plus l’entreprise industrielle de l’artisan est importante, plus son exploitation agricole est considérable. Les gros producteurs ont près de deux fois plus de bêtes de trait que les petits. Même les plus petits artisans (groupe I) ont une exploitation agricole supérieure à celle de la paysannerie moyenne. En 1877, en effet, la moyenne générale pour l’ensemble de la province de Moscou était de 0,87 cheval par foyer paysan((Voir Recueil de matériaux statistiques sur la situation économique de la population rurale. Editions du Comité des ministres. Annexe 1: Données des enquêtes des zemstvos par foyer, pp. 372-373. )). Cela veut dire que pour être artisan (patron ou petit patron) il faut être un paysan relativement aisé. Quant aux paysans pauvres, ils fournissent non pas les patrons mais surtout les ouvriers (salariés chez les «koustaris», ouvriers travaillant à l’extérieur). Pour l’immense majorité des métiers de la province de Moscou, nous ne possédons malheureusement aucun renseignement sur les exploitations agricoles des ouvriers salariés travaillant dans les petites entreprises. La chapellerie constitue toutefois une exception (voir les données générales dans notre tableau, annexe I). Voici donc des chiffres très instructifs concernant l’exploitation agricole des patrons et des ouvriers chapeliers.
On voit que les patrons sont des agriculteurs «très bien organisés», c’est-à-dire des représentants de la bourgeoisie paysanne et que les ouvriers salariés sont recrutés dans la masse des paysans ruinés((Il est caractéristique que l’auteur de la description du métier de la chapellerie «n’ait pas remarqué» là non plus, la décomposition de la paysannerie tant dans l’agriculture que dans l’industrie. Pareil à tous les populistes, il s’est borné, dans ses conclusions, à cette banalité absolument creuse: «Le métier n’empêche pas de s’occuper d’agriculture» (Les petites industries de la province de Moscou, t. VI, I, p. 231). Les contradictions économiques et sociales existant aussi bien dans le régime des petites industries que dans celui de l’agriculture ont été ainsi heureusement tournées. )). Pour qui veut définir les rapports en question, les données concernant les méthodes employées par les patrons-artisans pour exploiter la terre sont encore plus importantes. Les enquêteurs de Moscou distinguent trois modes d’exploitation: 1° le travail personnel du patron; 2° le louage. Cette méthode est employée par les patrons «déchus», qui ont des difficultés d’argent, qui se trouvent au bord de la ruine. Elle consiste à embaucher un voisin qui vient travailler avec son propre matériel; 3° l’exploitation «par le travail des ouvriers», méthode qui a une signification opposée à celle de la précédente. Le patron embauche des ouvriers agricoles («terriens»), en règle générale pour tout l’été, et quand la saison bat son plein, il envoie les ouvriers de son atelier aider ceux qui travaillent aux champs. «De cette façon, ce mode d’exploitation par ouvrier «terrien» est assez avantageux» (Les petites industries de la province de Moscou, VI, I, p. 48). Les renseignements fournis par notre tableau sur ce procédé portent sur 16 métiers. Parmi ces 16 métiers, il y en a 7 où on ne trouve aucun patron embauchant des «ouvriers terriens». Pour l’ensemble des 16 métiers, les patrons qui emploient des salariés agricoles représentent 12% du total, soit 4,5% dans le groupe I, 16,7% dans le groupe II et 27,3% dans le groupe III. On voit que plus les artisans sont riches, plus on rencontre d’entrepreneurs ruraux parmi eux. L’analyse des données concernant la paysannerie artisanale fait donc apparaître, aussi bien dans l’agriculture que dans l’industrie, une décomposition parallèle à celle que nous avons pu observer au chapitre II, quand nous avons examiné les données concernant la paysannerie agricole.
D’une façon générale, l’emploi d’«ouvriers terriens» par les patrons-artisans est un phénomène extrêmement répandu dans toutes les provinces industrielles. On en retrouve les traces chez les riches nattiers de la province de Nijni-Novgorod. Les pelletiers de cette province embauchent ordinairement des ouvriers agricoles venant des villages voisins purement agricoles. Les «paysans communautaires du canton de Kimry» qui s’occupent de cordonnerie, «estiment qu’ils ont avantage à faire cultiver leurs champs par des ouvriers et des ouvrières qui arrivent en masse de la province de Tver et des localités voisines». Pendant la morte saison industrielle, les potiers de la province de Kostroma envoient leurs ouvriers salariés travailler la terre((Travaux de la commission artisanale, III, 57, 112; VIII, 1354; IX, 1931, 2093, 2185. )). Dans la province de Vladimir, les «patrons indépendants» (il s’agit de doreurs) «ont des ouvriers qui s’occupent spécialement d’agriculture», ce qui leur permet d’avoir des champs bien entretenus quoique souvent «ils ne sachent eux-mêmes ni labourer ni faucher»((Les petites industries de la province de Vladimir, III, 187, 190. )). Dans la province de Moscou, en plus des artisans qui figurent sur notre tableau, on trouve des épingliers, des feutriers et des fabricants de jouets qui envoient leurs ouvriers travailler la terre; des tailleurs de pierre, des doreurs, des fabricants de boutons, des casquettiers, des bourreliers sur cuivre ont des salariés agricoles, etc.((Les petites industries de la province de Moscou, l.c. )) Le fait que des paysans industriels embauchent des ouvriers agricoles est extrêmement important. Il montre en effet que l’élévation du niveau de vie et des besoins de la population qui constitue un phénomène propre à tous les pays capitalistes et qui vient confirmer le rôle progressiste du capitalisme, commence à se faire sentir même dans les petites industries paysannes. L’artisan commence à regarder de haut le paysan patriarcal «barbare», et s’efforce de se libérer des travaux agricoles les plus durs et les moins rémunérateurs. Dans les petites industries où le capitalisme en est encore à un niveau extrêmement bas, ce phénomène reste très faible et l’ouvrier d’industrie commence à peine à se différencier de l’ouvrier agricole. Aux stades suivants du développement de l’industrie capitaliste, par contre, nous verrons que ce phénomène prend de vastes proportions.
Le problème des «liens existant entre l’agriculture et la petite industrie» est si important que nous devons examiner un peu plus en détail les données qui portent sur d’autres provinces que celles de Moscou.
Dans la province de Nijni-Novgorod la plupart des nattiers ont une exploitation agricole qui tombe en décadence et ils abandonnent la terre: environ 1/3 des champs destinés aux cultures d’hiver et la moitié des champs destinés aux cultures de printemps sont délaissés. Pour les «moujiks aisés, par contre, la terre n’est plus une marâtre, mais une mère nourricière»; ils ont du bétail en quantité suffisante, des engrais, ils prennent des fermages, ils font en sorte que leur lot ne soit plus redistribué et ils l’exploitent avec davantage de soin. «Le moujik riche est devenu un seigneur qui asservit son frère, le moujik pauvre» (Travaux de la commission artisanale, III, 65). Chez les pelletiers qui sont pourtant de «piètres laboureurs», les patrons les plus riches forment néanmoins une catégorie à part: ils «prennent en location la terre des pauvres de leur village», etc. Voici d’ailleurs quels sont les budgets typiques des pelletiers des différents groupes.
Sur ce tableau, le parallélisme existant entre la décomposition des agriculteurs et celle des artisans apparaît avec une grande netteté. A propos des forgerons, l’auteur écrit qu’il y a deux catégories pour lesquelles «l’industrie est plus importante que l’agriculture». Ce sont, d’une part, les riches patrons et, d’autre part, les ouvriers «sans feu ni lieu» (ibid., IV, 168).
L’ouvrage sur les Petites industries de la province de Vladimir étudie le problème des rapports existant entre la petite industrie et l’agriculture, de façon beaucoup plus détaillée que les autres enquêtes. Il nous fournit des données exactes qui portent non seulement sur l’exploitation agricole des «koustaris» «en général» (comme il ressort de tout ce qui précède ces «moyennes» sont absolument fictives), mais également sur celles des «koustaris» des différents groupes et catégories: gros patrons, petits patrons, ouvriers salariés; propriétaires de petits ateliers de tissage et tisserands; patrons-artisans et autres paysans; familles employées dans les industries locales ou allant s’embaucher au-dehors, etc. De cet ensemble de données, M. Kharisoménov tire la conclusion suivante: si on divise les «koustaris» en 3 catégories: 1) gros producteurs; 2) producteurs petits et moyens; 3) ouvriers salariés, on constate que la situation de l’agriculture ne cesse d’empirer, que la superficie cultivée et le nombre du bétail diminue, que le pourcentage des exploitations «déchues» augmente, etc., au fur et à mesure que l’on descend de la première catégorie à la troisième((Voir Iouriditcheski Vestnik, 1883, t. XIV, n°s 11 et 12. )). Malheureusement, M. Kharisoménov considère ces données de façon trop unilatérale, sans tenir compte du processus parallèle et indépendant de décomposition de la paysannerie agricole. C’est pourquoi il n’en tire pas la conclusion qui en découle logiquement, à savoir que dans l’agriculture comme dans l’industrie, la paysannerie est en train de se scinder en petite bourgeoisie et en prolétariat rural((Il s’en est fallu de peu que M. Kharisoménov n’aboutisse à cette conclusion. Pour s’en rendre compte, il suffit de voir comment, dans sa description de l’industrie de la soie, il définit le développement économique depuis l’abolition du servage; «au point de vue économique, écrit-il, le servage nivelait la paysannerie, il liait les mains au paysan riche, soutenait le paysan pauvre, empêchait les partages entre membres d’une même famille. L’économie naturelle ne laissait qu’un champ bien étroit à l’activité commerciale industrielle. Le marché local ne donnait pas assez de champ à l’esprit d’entreprise. Le marchand ou le petit producteur paysan amassait de l’argent, sans risque il est vrai, mais très lentement et avec difficultés et le cachait dans son bas de laine. Après 1860 les conditions changent. Le servage est aboli; le crédit, les chemins de fer, en créant un marché vaste et lointain, donnent du champ au paysan industrieux, marchand ou fabricant. Tout ce qui dépassait le niveau économique moyen prend rapidement pied, agrandit son commerce ou son industrie, développe son exploitation quantitativement et qualitativement. Tout ce qui était au-dessous de ce niveau tombe, déchoit et va grossir les rangs des hommes sans terre, sans cultures, sans chevaux. La paysannerie se différencie en koulaks, en paysans d’aisance moyenne et en prolétaires sans exploitation rurale. L’élément koulak de la paysannerie acquiert bientôt toutes les habitudes du milieu cultivé; il vit en seigneur; il donne naissance à une classe, numériquement si importante en Russie, de gens à demi cultivés» (III, 20, 21).)). C’est pourquoi également il lui arrive souvent de tomber dans les raisonnements habituels des populistes sur l’influence qu’exerce le «métier» en général sur l’ «agriculture» en général (voir, par exemple, les Petites industries de la prov. de Vladimir, II, 288; III, 91), c’est-à-dire d’ignorer volontairement les contradictions profondes qui existent au sein même de l’organisation sociale aussi bien de l’industrie que de l’agriculture, et dont il avait dû lui-même admettre l’existence. Pour les petites industries de la province de Vladimir, nous avons encore un enquêteur, M. Prougavine, qui est un représentant typique des conceptions populistes. Voici un exemple de ses raisonnements. D’une façon générale, écrit-il, il est impossible de considérer que l’industrie des cotonnades du district de Pokrov «constitue un principe nuisible (sic) pour la vie agricole des tisserands» (IV, 53). Toutes les données montrent que la masse des tisserands a des exploitations agricoles en mauvais état et que chez ceux qui ont de petits ateliers, par contre, le niveau de l’agriculture est bien supérieur au niveau moyen (ibid.); sur le tableau on peut d’ailleurs voir que parmi ces derniers certains embauchent des ouvriers agricoles. Conclusion: «les petites industries et l’agriculture marchent de pair, leur développement et leur prospérité sont interdépendants»(60). C’est là une de ces phrases qui servent à masquer le fait que la bourgeoisie paysanne est en train de se développer et de prospérer aussi bien dans l’agriculture que dans les petites industries((C’est à des phrases de cette nature que M. V. V. se borne quand il traite cette question au chapitre VIII de ses Essais sur I’industrie artisanale. «L’agriculture … soutient les petites industries» (205); «Les petites industries sont un des plus sûrs remparts de l’agriculture des provinces industrielles» (219). Les preuves Tant que l’on voudra: prenez. par exemple, les patron-corroyeurs, amidonniers, fabricants d’huile, etc. (ibid., 224), et vous verrez que chez eux l’agriculture se maintient à un niveau plus élevé que chez la masse des paysans !)).
Le recensement des industries artisanales de la province de Perm (1894-1895) nous fournit des renseignements absolument analogues: dans cette province, en effet, c’est chez les petits producteurs de marchandises (patrons et petits patrons) que la situation de l’agriculture est la meilleure et ils embauchent des ouvriers agricoles. Chez les artisans, elle est déjà moins bonne et chez les «koustaris» travaillant pour un revendeur, elle est la plus mauvaise (malheureusement aucune donnée ne nous est fournie sur l’exploitation agricole des ouvriers salariés et des patrons des différents groupes). Le recensement constate également que lorsqu’ils ne sont pas agriculteurs, les «koustaris» comparativement aux agriculteurs ont 1) une productivité du travail plus élevée, 2) un revenu net beaucoup plus important et 3) un niveau de culture et d’instruction plus élevé. Tous ces phénomènes viennent confirmer notre conclusion et suivant laquelle, même au premier stade du capitalisme, l’industrie a tendance à provoquer une amélioration du niveau de vie de la population (voir Etudes, pages 138 et suivantes)((Voir Lénine, Œuvres, Paris-Moscou, t. 2, pp. 394 et suivantes. )).
Pour en terminer avec le problème des rapports entre les petites industries et l’agriculture, il nous faut noter enfin qu’en règle générale, ce sont les plus grosses entreprises qui ont la plus longue période de travail. Dans l’industrie du meuble de la province de Moscou, par exemple, la période de travail dure 8 mois pour les ouvriers en bois blanc (dans cette branche, l’effectif moyen des ateliers est de 1,9 ouvrier), 10 mois pour les ouvriers du meuble courbé (2,9 ouvriers par atelier) et il est de 11 mois pour ceux du gros meuble (effectif moyen: 4,2 ouvriers par entreprise). Dans l’industrie de la chaussure de la province de Vladimir, on trouve 14 petits ateliers (2,4 ouvriers par atelier en moyenne) où la période de travail est de 40 semaines et 8 grosses entreprises (9,5 ouvriers en moyenne) où elle est de 48 semaines, etc.((Les sources ont été indiquées plus haut. Le même phénomène a été constaté lors des recensements par foyer des vanniers, des fabricants de guitare et des amidonniers de la province de Moscou. Le recensement artisanal de la province de Perm nous montre également que la période de travail est plus prolongée dans les grands ateliers (voir Essais sur l’industrie artisanale dans la province de Perm, p. 78. Malheureusement, on n’y trouve pas de chiffres précis). )). Il est donc clair que ce phénomène est lié au fait que les grandes entreprises emploient plus d’ouvriers (familiaux, salariés industriels et salariés agricoles) que les petites et qu’il est l’indice d’une plus grande stabilité et d’une tendance à se spécialiser dans l’activité industrielle.
Faisons maintenant le bilan de toutes ces données sur les petites industries et l’agriculture. On s’aperçoit tout d’abord qu’au stade inférieur du capitalisme que nous sommes en train d’examiner, l’artisan est encore très peu différent de l’agriculteur. Les combinaisons métier-agriculture jouent un rôle très important dans le processus d’aggravation de la décomposition de la paysannerie: alors que les riches patrons ouvrent des ateliers, embauchent des ouvriers qu’ils recrutent dans le prolétariat rural et amassent de l’argent qu’ils utilisent pour des opérations commerciales ou d’usure, la paysannerie pauvre, elle, fournit les ouvriers salariés, les «koustaris» qui travaillent pour les revendeurs, et les patrons des groupes inférieurs qui sont les plus opprimés par le pouvoir du capital commercial. On voit que la combinaison du métier et de l’agriculture consolide et développe les rapports capitalistes et qu’elle les fait passer de l’industrie à l’agriculture et réciproquement(( Dans l’industrie laitière de la province de Vladimir, par exemple, les gros «fabricants» et les maîtres-artisans se distinguent par le niveau supérieur de leur exploitation agricole. «Dans les moments de marasme industriel les maîtres-artisans cherchent à acheter un domaine, à s’occuper d’exploitation rurale et quittent tout à fait le métier» (Les petites industries de la province de Vladimir, t. II, p. 131). Cet exemple est à retenir, car des faits de ce genre offrent parfois aux populistes l’occasion d’en conclure que «les paysans reviennent à l’agriculture»; que «les exilés du sol lui doivent être rendus». (M. V. V. Vestnik Evropy, n° 7, 1884). )). A ce stade, la séparation de l’industrie et de l’agriculture qui caractérise la société capitaliste n’en est encore qu’à la phase embryonnaire, mais se manifeste déjà. Et, chose particulièrement importante, elle se manifeste tout autrement que ne le pensent les populistes. Quand ils disent que la petite industrie «ne porte pas préjudice» à l’agriculture, les populistes estiment que ce préjudice consisterait à abandonner l’agriculture pour une activité plus lucrative. Mais il s’agit là d’une fiction (et non d’une conclusion basée sur des faits), d’une fiction de mauvais aloi et qui ne tient aucun compte des contradictions que renferme le régime économique de la paysannerie. La séparation de l’industrie et de l’agriculture va de pair avec la décomposition de la paysannerie et suit des voies différentes à chacun des deux pôles de la campagne: la minorité aisée fonde des entreprises industrielles, les développe, améliore l’agriculture, embauche des ouvriers agricoles, consacre à l’industrie une partie toujours plus longue de l’année et (quand l’industrie en est arrivée à un certain stade), estime qu’elle a intérêt à séparer ses entreprises industrielles de ses exploitations agricoles, à céder ces dernières à d’autres membres de la famille ou bien à vendre les bâtiments, le bétail, etc., pour se faire inscrire comme bourgeois ou marchand((«Les paysans ont. expliqué que ces derniers temps plusieurs «industriels» aisés se sont établis à Moscou pour y exercer leur métier.» La brosserie d’après l’enquête de 1895, p. 5. )). Dans ce cas, la séparation de l’industrie et de l’agriculture est précédée par la création d’un régime d’entreprise dans l’agriculture. A l’autre pôle de la campagne, en revanche, la séparation provoque la ruine des paysans pauvres et leur transformation en ouvriers salariés ( agricoles ou industriels) A ce pôle de la campagne, ce qui pousse les paysans à abandonner non seulement la terre mais également leur métier indépendant ce n’est pas l’avantage que rapporte la petite industrie, mais le fait qu’ils sont ruinés et réduits à la misère. Ici, le processus de séparation de l’industrie et de l’agriculture se ramène à exproprier le petit producteur.