Éducation et formation des cadres
Parti Communiste Français (PCF)
Le marxisme exige que le travail théorique soit lié au travail pratique.
Essayer de faire des cadres rien que par le travail pratique sans leur donner les connaissances théoriques nécessaires cela veut dire préparer des dirigeants aveugles.
Mais l’aveugle ne va pas loin sans se casser la tête.
Le problème de l’éducation de l’ensemble des membres du parti et la formation de cadres se pose actuellement devant le parti comme une nécessité vitale.
Les articles parus dans les Cahiers dernièrement et les discussions et plaintes dans les organismes à la base le prouvent.
La crise a en peu de temps mis en mouvement et ébullition les larges masses des travailleurs salariés; paysans-travailleurs et petits commerçants.
Étant donné que notre parti est le seul capable de mener ces masses exploitées à la solution de la crise, il se pose devant lui la tâche immense d’embrasser et canaliser ce large mouvement dans la voie révolutionnaire.
Mais les faiblesses organique et idéologique (et surtout cette dernière, car d’elle dans une grande mesure dépend la première) se dresse comme un grand obstacle à la réalisation de cette tâche historique et très urgente.
La plupart des camarades qui ont écrit sur la question d’éducation demandent au centre de prendre des mesures nécessaires pour organiser des écoles.
La rédaction des Cahiers a répondu qu’en dehors des écoles centrales sont envisagées des écoles régionales, des écoles de rayons et des écoles élémentaires de base.
Espérons que la tâche entreprise sera couronnée de succès, mais les efforts du centre ne suffisent pas et la création des écoles n’épuise pas la question d’éducation.
Le côté faible des écoles du Parti consiste en ceci que la durée d’étude est trop courte.
Les connaissances données par les écoles doivent être considérées comme base, comme un point de départ pour l’éducation ultérieure plus large et approfondie.
Le problème doit être posé en son entier et sur tous les terrains.
D’abord il nous faut commencer par combattre cette négligence envers l’étude qui se manifeste chez certains camarades du parti.
Les camarades dirigeants (des régions, rayons, cellules) doivent soulever cette question à chaque occasion dans les réunions d’information, dans les comités régionaux, de rayon et dans les cellules.
Il nous faut commencer une véritable campagne pour l’éducation, combattre les opinions qui tendent à empêcher sa réalisation: les préjugés nuisibles et les sous-estimations.
Certains camarades disent qu’ils ne peuvent pas s’éduquer car surchargés de tâches ils ne disposent pas de temps.
Ces camarades doivent comprendre que le temps employé pour l’étude n’est pas perdu, mais au contraire le mieux utilisé.
Notre expérience du passé nous montre que notre travail pratique a donné souvent des résultats nuls ou même négatifs parce que nous l’avons mal fait par cause de l’incompréhension des tâches, par manque de connaissances.
Donc avant de réaliser une tâche il faut bien l’étudier.
C’est dans ce sens que notre travail d’éducation doit être orienté.
Refuser l’étude parce que surchargé de tâches veut dire en réalité se refuser à bien exécuter ces tâches.
Dans une cellule de notre rayon un nouvel adhérent a posé la question de causeries organisées par la cellule avec ses propres forces.
La majorité des camarades se souleva contre la proposition.
Ils jugèrent l’affaire impossible, car la cellule ne possède pas d’orateurs.
« Nous ne sommes pas des Marcel Cachin », répliqua un camarade.
C’est une opinion fausse et nuisible. C’est un préjugé bourgeois de supposer que l’ouvrier est incapable de s’instruire et de devenir un orateur, conférencier, etc.
En luttant contre de tels préjugés nous devons susciter dans la masse du parti un esprit favorable à l’éducation et créer un courant d’émulation.
En même temps nous devons commencer à organiser l’éducation dans toutes ses formes :
- D’abord il est nécessaire que la section centrale d’éducation éta blisse des programmes détaillés pour les différents degrés d’étude avec l’indication de la bibliographie.
- Création des écoles de degrés différents. Les régions et les rayons qui ont la possibilité doivent les réaliser de suite sans attendre l’aide et les directives du centre.
- Elargir l’utilisation de l’école par correspondance; la populariser parmi les membres du Parti et améliorer ses méthodes d’enseignement. Cette forme d’éducation était sous-estimée jusqu’à présent. Par ses avantages elle peut devenir une forme d’éducation de masse.
- Création de cercles d’étude marxistes-léninistes, surtout pour les sympathisants. C’est une forme d’auto éducation collective.
L’école suppose un maître ; le cercle peut s’en passer.
Chaque membre (ou les plus avancés d’abord) est chargé d’étudier et de développer devant le cercle une question donnée. Après l’exposé on ouvre une discussion à laquelle prennent part tous les membres du cercle.
Dans ces cercles nous devons entraîner et utiliser les étudiants qui s’intéressent à la théorie marxiste-léniniste.
Il existait l’année passée à Lyon un cercle marxiste d’étudiants tout à fait détaché du parti.
Dans d’autres pays (la Russie, la Bulgarie, par exemple) les étudiants ont fait et font beaucoup pour la propagande révolutionnaire. On doit surveiller de ne pas transformer le cercle en parlote académique.
Auto éducation individuelle par lecture et participation active au travail du parti. Cette méthode dans les conditions du régime capitaliste (où manquent des écoles supérieures marxistes-léninistes) est le seul moyen pour la formation de cadres d’une haute qualification.
Dans les cellules nous devons introduire l’habitude de lecture collective d’articles (des Cahiers, extraits de brochures, des journaux) traitant des questions d’actualité intéressantes.
On doit chercher les réponses du parti données aux questions discutées par les ouvriers dans les usines et utiliser ces réponses pour la propagande.
Chaque cellule doit être abonnée aux Cahiers du bolchévisme et ces derniers lus à tour de rôle par tous les membres ou au moins par la direction obligatoirement.
Toutes ces formes d’éducation exigent une riche littérature révolutionnaire. Cette littérature ne peut être procurée que par la formation de bibliothèques. Nous devons immédiatement poser les bases de bibliothèques régionales, de rayon et de cellule. Les premiers livres peuvent être fournis par les camarades qui en ont déjà.
Lapierre
Mars 1934