Thèse sur la tactique électorale
Parti Communiste – Section française de l’Internationale communiste (PC-SFIC)
Le Parti Communiste, parti de lutte de classe et de révolution, oppose aux dogmes démocratiques une négation catégorique.
Appuyé sur l’histoire, il déclare que la conquête du pouvoir politique par le prolétariat à l’aide du suffrage universel est impossible.
Il sait que la dictature bourgeoise ne sera renversée que par la force et devra être remplacée par la dictature des ouvriers et des paysans jusqu’au triomphe complet du communisme.
L’action électorale n’a donc pour lui qu’une valeur secondaire. Elle doit servir, non pas à l’occupation progressive du pouvoir par les travail leurs s’emparant peu à peu des assemblées délibérantes, mais à la diffusion des idées communistes parmi les masses, au recrutement du Parti, à l’agitation révolutionnaire, portée, toujours avec plus d’audace, au cœur même des institutions bourgeoises.
Pour les communistes, la question d une entente permanente ou temporaire avec tout autre parti ne saurait même pas se poser. Ni pour le présent, ni pour l’avenir, le Parti ne peut envisager, sous quelque forme que ce soit, un accord avec les partis bourgeois.
Pour les élections générales, législatives, cantonales ou municipales, comme pour les élections partielles de tout ordre, il repousse l’idée même d’une entente.
Son action électorale ne peut être qu’une des formes de son action politique d’ensemble, qui tend à grouper et à organiser les travailleurs en parti de classe, pour la prise révolutionnaire du pouvoir.
Les fondateurs même du communisme scientifique ont revendiqué pour le prolétariat le droit de faire servir à ses fins propres les conflits secondaires de la bourgeoisie. Le Parti, surtout dans cette période de désagrégation et de trouble social, manquerait aux règles les plus élémentaires de la tactique s’il ne faisait, autant qu’il est possible, tourner à son profit les antagonismes qui opposent souvent les diverses fractions de la classe possédante. Mais il se doit d’agir, dans ce sens, avec une entière franchise.
Le Parti Communiste voit dans la complaisance avec laquelle les groupements pseudo-socialistes cherchent l’alliance de tels ou tels partis bourgeois la marque de leur irrémédiable déchéance. Pour lui, nulle tractation avec d’autres partis, nulle combinaison électorale, sous quelque forme qu’on la puisse imaginer, ne saurait exister.
Repoussant tous rapports avec les états-majors des autres partis, les communistes s’efforceront par leur propagande, de rechercher dans les divers groupements politiques les travailleurs qui s’y sont égarés et de montrer aux petits bourgeois, à la petite propriété paysanne, comment le grand capitalisme les opprime.
Les élections législatives partielles, les élections municipales ou cantonales qui auront lieu jusqu’à cette date, seront soumises au système du scrutin majoritaire avec deuxième tour.
Le Parti a donc le devoir, en vue de ces diverses consultations électorales, de préciser sa tactique. Celle-ci doit être fixée à la lumière des principes rappelés plus haut.
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Toute élection, si modeste que soit son importance, doit être, pour le Parti Communiste, l’occasion d’une affirmation révolutionnaire. Partout et toujours, la doctrine du Parti doit être exposée sans réticence et, à tous les tours de scrutin, le principe de la lutte de classe mis en action. Le moindre manquement au devoir communiste, en cette matière, doit faire l’objet de sanctions sévères. C’est pourquoi il importe que le Comité Directeur, investi des droits du Parti lui-même par le Congrès National, contrôle toujours l’action électorale des Fédérations.
Dans tous les cas où, après le premier tour, il apparaît que le candidat du Parti peut espérer le succès pour le scrutin de ballottage, la lutte doit être continuée avec un redoublement d’énergie.
C’est toujours sur le terrain d’action du communisme qu’elle sera poursuivie, le Parti faisant appel aux masses, sans rien retrancher de son programme révolutionnaire et en évitant toute déclaration qui pourrait, à cet égard, prêter à l’équivoque et ravaler le candidat communiste au rôle humilié des concurrents bourgeois en quête de mandats. Dans le cas même où d’autres candidats se désisteraient en faveur du porte-drapeau communiste, celui-ci ne devra pas s’autoriser de ces désistements pour réclamer des suffrages, mais continuer de faire directement appel aux masses au nom du Parti.
Le Parti ne pourrait, sans affaiblir la notion de la lutte de classe, prononcer au deuxième tour de scrutin le désistement de son candidat en faveur du représentant d’un autre parti. Il repousse toute tactique de ce genre, comme incompatible avec ses idées essentielles.
Dans tous les cas où il apparaîtra qu’en maintenant son candidat au second tour de scrutin, sans espoir de succès, le Parti risque d’affaiblir le résultat obtenu au premier tour et de créer, dans la circonscription, une situation défavorable pour le développement ultérieur du communisme, la prudence commandera à la Fédération intéressée de retirer purement et simplement son représentant.
D’autre part, si une Fédération juge qu’elle peut, sans inconvénient pour le Parti, et avec l’espoir légitime de prolonger son effort de propagande, maintenir jusqu’au bout son candidat, même dans le cas où le succès du communisme au second tour semble improbable, le Parti a le devoir de tenir compte d’une telle situation et d’un pareil état d’esprit.
La complication extrême de la situation politique actuelle et les difficultés auxquelles le Parti se heurte encore dans son effort de développement, ne permettront donc pas d’établir une règle unique pour le second tour de scrutin.
C’est pourquoi le Congrès décide, pour les élections partielles, jusqu’en 1924, de laisser à chaque Fédération le soin de proposer à la ratification du Comité Directeur la solution qui lui paraîtra la meilleure en cas d’insuccès au premier tour : retrait pur et simple du candidat communiste, ou continuation de la lutte au second tour.
Le Comité Directeur s’efforcera d’unifier la tactique en s’inspirant des intérêts généraux du communisme. Aucune décision ne sera valable si elle n’a obtenu son approbation. C’est au Comité Directeur qu’il appartiendra, en cas de désaccord, de fixer l’altitude du Parti. Toute faute contre la discipline appellera les sanctions de la Commission des conflits.