Textes de bases du PCm
Parti Communiste Maoïste (PCm)
V. Féminisme prolétarien révolutionnaire
2. Évolutions et fonctionnements
Bien que toutes les régions du monde n’aient pas connu exactement les mêmes évolutions ni les mêmes temporalités, le schéma est similaire de manière générale. Nous parlons ici plus spécifiquement de l’Europe occidentale puisque que c’est ici que nous agissons aujourd’hui, et qu’il s’agit donc de l’espace que nous devons comprendre en premier afin de lutter efficacement. Toutefois, nous nous appuyons sur toutes les expériences à l’échelle internationale.
Dans le mode de production féodal, pour les femmes, les choses n’évoluent pas beaucoup. Elles restent dominées et niées en tant qu’individus. La situation empire même puisque tout est fait pour faire disparaître les traces d’une société plus égalitaire : les femmes ne doivent servir qu’à procréer et entretenir le foyer. Toutes celles qui sortent de ce schéma sont traquées. C’est notamment le cas avec la chasse aux sorcières : on détruisait les femmes en possession de savoirs médicaux, et notamment abortifs, mais aussi les femmes célibataires et toutes celles qui, par leur mode de vie, leurs connaissances ou leurs convictions, remettaient en cause le système patriarco-féodal. Elles furent pourchassées, torturées, tuées parce qu’elles allaient contre la domination des femmes voulue par le système et soutenue par la religion.
Dans la paysannerie, les femmes travaillent au champ en plus de s’occuper du foyer, tandis que chez la noblesse, les servantes (nourrices et cuisinières) s’occupent des tâches du foyer, la femme noble étant simplement un objet d’apparat utile à l’homme pour faire des alliances et des enfants. Les familles bourgeoises tendent à imiter l’organisation familiale de la noblesse, et face à la montée en puissance de cette classe, le mode de production et donc la place des femmes doivent être adaptés.
Alors que les femmes avaient participé activement au succès de cette révolution, elles se retrouvent grandes perdantes lorsque la bourgeoisie instaure et renforce sa domination. En 1789, les femmes se sont révoltées, elles ont pris les armes au côté des hommes. Les 5 et 6 octobre par exemple, lors de la « marche des femmes » sur Versailles, elles sont allées bousculer l’ordre établi en portant armes et enfants. Des revendications d’égalité apparaissent, les femmes se regroupent, s’organisent, en particulier à Paris : Olympe de Gouges, notamment, après s’être engagée contre l’esclavage, écrit la Déclaration des droits de la Femme et de la Citoyenne, proclamant que « La femme a le droit de monter sur l’échafaud ; elle doit avoir également celui de monter à la Tribune. ». Dans les milieux plus populaires, ces revendications se développent aussi, mais l’Histoire, écrite par la classe dominante, n’a pas transmis leur nom.
La bourgeoisie de France, une fois arrivée au pouvoir, fait tout pour renforcer l’exploitation ; elle tente donc de remettre les femmes « à leur place », c’est-à-dire dans l’ombre du foyer. Celles qui refusent sont réprimées. Olympe de Gouges, comme beaucoup d’autres, meurt sur l’échafaud en 1792 pour son engagement politique. Nombreuses sont celles qui sont violées, tabassées et tuées parce qu’elles revendiquent une existence économique, politique et sociale.
Toutefois il n’existe pas de réel mouvement collectif fort et organisé pour lutter contre le patriarcat, celui-ci reste donc en place et se renforce. A partir de là, notamment avec le Code Napoléon, le système patriarcal se formalise et s’organise de plus en plus, et de fait s’ancre plus profondément encore dans la société.
Les femmes s’occupent toujours des enfants en même temps qu’elles travaillent, y compris souvent à domicile avec la livraison de pièces à assembler ou autres métiers permettant le travail à domicile.
La bourgeoisie augmente la durée du travail pour accroître ses profits (changement de calendrier avec passage d’une semaine de 7 jours à une semaine de 10 jours pour toujours un jour de repos et allongement de la journée de travail jusqu’alors bloquée par les corporations), et donc celui des femmes qui sont obligées de travailler pour faire survivre le foyer. Cependant cette augmentation ne leur permet plus de s’occuper correctement des enfants (utilisation d’alcool pour les tenir tranquilles pendant les douze heures de la journée de travail). Par la même occasion, la famille mononucléaire se délite puisque chaque membre du couple passe plus de temps au travail qu’ensemble.
A ce moment, la bourgeoisie se confronte à l’Église dans sa course au profit à très court terme, mais aussi aux prolétaires qui ont de moins en moins à perdre puisque même leurs enfants meurent du fait de l’organisation de la société imposée par la classe bourgeoise.
Face à cet état de fait, à la lutte des prolétaires et à la non reproduction des forces de travail (faible espérance de vie, mortalité infantile très importante), la bourgeoisie est obligée de corriger le tir et décide de s’appuyer sur l’Église pour maintenir une exploitation sur un plus long terme. Cela passe par une augmentation relative des salaires des ouvriers et une restriction de l’accès au marché du travail pour les femmes (sauf pour certains métiers bien spécifiques comme nourrices, femmes de ménage au service des bourgeois).
En même temps, l’accaparement des richesses des colonies permet à la bourgeoisie d’être plus libérale en métropole pour s’assurer une base plus stable.
De fait, les femmes se retrouvent de nouveau cloîtrées dans les foyers à gérer la production domestique. La situation est un peu différente à la campagne où les paysannes ont toujours participé à la production agricole dirigée par leur père puis par leur mari ou leurs frères.
Les femmes sont donc cantonnées dans la sphère privée, à l’intérieur du foyer. Ainsi, une nouvelle division sexuée du travail se développe. Le travail domestique est confié aux femmes, ce qui est considéré comme normal car découlant de « compétences naturelles ». Par conséquent, il n’est ni reconnu, ni valorisé.
La bourgeoisie, soutenue par l’Église, répand l’idée que les femmes sont fainéantes, frivoles, irresponsables, et qu’elles doivent rester sous l’autorité de leur père puis de leur mari, sans quoi elles deviendraient des prostituées, des femmes « de mauvaise morale ». On retrouvera ces arguments dans l’opposition au droit de vote des femmes tandis que la gauche s’oppose à leur droit de vote par peur qu’elles votent pour les conservateurs ; la droite, elle, pense que cela détruirait la famille.
La classe bourgeoise a ici trouvé une recette magique pour servir ses intérêts : elle divise les prolétaires et permet de reproduire les forces de travail qui lui sont indispensables en faisant des profits puisqu’elle exploite de la main d’œuvre gratuite (travaux domestiques et à la ferme) et/ou à bas prix (travail à l’usine).
En Europe et en Amérique du Nord, c’est la première guerre mondiale qui va permettre aux femmes de revenir dans le processus de production reconnu comme au sein des usines (les places sont libérées par les hommes partis au front et il faut augmenter la production de guerre). En même temps, elles continuent de gérer le travail domestique (organisation commune de garde des enfants et cuisine en commun se développent).
Ce passage dans les usines où les femmes restent bien moins payées que les hommes permet aux femmes prolétaires de se rencontrer sous le joug de la même exploitation. Elles prennent également conscience de leurs capacités à faire tourner la société sans les hommes. À cette occasion, l’idéologie patriarcale, intériorisée et reproduite également par les femmes (à travers l’éducation des enfants par exemple), s’effrite.
Les femmes demandent de nouveaux droits comme une rémunération égale à celle des hommes ou encore le droit de voter (à ce sujet, la base sociale d’un pays accorde certes plus de possibilités de changement, mais ces changements progressistes ne sont en rien automatiques. Ainsi, un pays comme la Turquie à la structure semi-féodale a accordé le droit de vote aux femmes bien avant la France !).