Textes de bases du PCm
Parti Communiste Maoïste (PCm)
VII. L’anti-impérialisme
3. Analyser l’impérialisme français
Comme l’a indiqué Lénine, à l’époque de l’impérialisme, il y a les pays oppresseurs et les pays opprimés. La France fait partie des oppresseurs, des pays impérialistes. L’impérialisme français fait partie des « vieux » pays impérialistes. Il a un passé colonial et a joué un rôle majeur dans les guerres mondiales de repartage de la planète.
Dans ce sens, l’impérialisme français est en concurrence absolue avec les autres pays impérialistes et peut être en alliance relative avec certains. Ce principe doit être bien compris. Certains ayant dévié de ce principe ont développé des positions « souverainistes », affirmant que la France était dominée par l’impérialisme américain. Non, la France n’est pas dominée par l’impérialisme américain. Elle est en concurrence avec lui. Mais elle est aussi en alliance relative avec lui. Ces alliances relatives concernent des zones d’influence, des marchés particuliers, des ressources particulières.
La crise a exacerbé la concurrence inter impérialiste et chacun essaye de mieux placer ses pièces sur l’échiquier mondial pour le contrôle des ressources. D’autant plus que de nouveaux pays impérialistes concurrents se relancent dans la course tels que la Russie et la Chine.
L’impérialisme français doit donc défendre son pré carré, c’est-à-dire l’ensemble des zones qu’il domine et dont il exploite les ressources et populations. Par son passé colonial, une de ces zones principales est l’Afrique. Ce n’est pas pour rien si ces dernières années, l’impérialisme français est intervenu directement en Côte d’Ivoire, en Libye et au Mali. Les classes dirigeantes des « anciennes » colonies ont toujours des liens de subordination avec l’impérialisme français, dans les domaines économiques, politiques et militaires.
L’Afrique est un continent convoité car c’est un continent riche en matières premières. Les exportations de matières premières sont très importantes, tout comme les importations de produits manufacturés. L’impérialisme mène donc en Afrique une politique d’extraction des matières premières pour les transformer ailleurs, augmentant la dépendance économique des pays concernés.
1. Bref aperçu historique des communistes français face à leur impérialisme
En France, c’est dans la lutte contre l’impérialisme et le révisionnisme que le premier parti communiste est né. On ne saurait aborder la question de l’impérialisme sans parler du développement du mouvement communiste dans l’Etat français. C’est sous la pression de l’Internationale Socialiste (IIème Internationale) qu’est créée en 1904, la Section Française de l’Internationale Ouvrière (SFIO). Celle-ci va passer sur les positions de la bourgeoisie en 1914, appuyer la guerre impérialiste (Union sacrée) et être ainsi co-responsable de la boucherie impérialiste avec les autres partis de l’Internationale, sauf le Parti de Lénine et des minorités internationalistes de certains partis socialistes. Du 5 au 8 novembre 1915 à Zimmerwald (Suisse), une conférence se réunit pour coordonner l’action pour la paix dans tous les pays. Deux syndicalistes français s’y rendent : Alphonse Merrheim et Albert Bourderon. Lénine appelle à créer une IIIème Internationale avec les vrais socialistes. Les délégués français créent un Comité pour la reprise des relations Internationales (CRRI). Ils sont rejoints par le socialiste Fernand Loriot. Le 30 septembre 1916, nouvelle conférence à Kienthal (Suisse). Trois députés socialistes y participent, demandent un armistice immédiat, la paix sans annexion et condamnent la défense nationale. Pourtant, le 9 Avril 1916, la minorité (Longuet) obtient 916 voix contre 1996 de la majorité qui regroupe les vieux chefs (Jules Guesde, Edouard Vaillant, Marcel Sembat, Albert Thomas, Pierre Renaudel) et est pour l’Union sacrée. Les minoritaires ont une position ambiguë : défense nationale et paix. La révolution éclate en Russie. Le 13 Avril Marcel Cachin et Martin Moutet se rendent en Russie accompagnés du ministre socialiste des armements, Albert Thomas. Ils soutiennent le gouvernement provisoire de Kerenski contre les bolcheviks. Même Marcel Cachin, futur dirigeant du PCF, attaque les bolcheviks dans ses Carnets. La SFIO se retire du gouvernement. Dans la SFIO il y a quatre courants : les tenants de l’Union sacrée, les zimmerwaldiens (Bourderon, syndicaliste et Loriot, socialiste) qui sont pour la construction d’une IIIème Internationale, Longuet et Pressemane, eux sont pour la reconstruction progressive de la IIème Internationale et il y a les centristes comme Léon Blum. Le 2 Octobre 1917, l’ARAC (Association Républicaine des Anciens Combattants) est créée par Paul Vaillant-Couturier, Raymond Lefebvre et Henri Barbusse qui deviendront des dirigeants communistes.
Le 4 mars 1919 est votée la création de la IIIème Internationale. S’y rallient le Parti Socialiste italien, le Parti social-démocrate de Norvège, l’aile gauche du Parti suédois, du Parti social-démocrate bulgare, du Parti communiste polonais, du Parti social-démocrate suisse, des socialistes américains, des galiciens, le Parti socialiste d’Alsace-Lorraine, des socialistes de Bohême, du Mexique (du 19 mars à décembre). La révolution spartakiste éclate à Berlin le 13 janvier 1919. Le 21 mars c’est en Hongrie avec Bela Kun. Des mutineries ont éclaté en Mer Noire avec André Marty et Charles Tillon (futurs dirigeants communistes).
C’est en 1921 que le Parti Communiste est formé. Cela a été l’aboutissement d’une lutte de résistance au sein de la IIème Internationale, de petits groupes au sein du parti socialiste et de la CGT contre la guerre impérialiste. Le coup de tonnerre de la Révolution d’Octobre a été comme un rayon de soleil pour ceux qui avaient été abusés par les opportunistes de la SFIO et de la IIème Internationale qui les avaient envoyés à la boucherie pour le compte de l’impérialisme au nom de l’Unité nationale contre un autre impérialiste au lieu d’avancer le mot d’ordre « retourner les armes contre la bourgeoisie ».
L’une des fameuses « 21 conditions » d’entrée au sein du l’IC (la numéro 8 précisément), précisait qu’il fallait mener une lutte anti-impérialiste et en faveur de la lutte de libération nationale pour les peuples opprimés et colonisés. Dans cette situation, les communistes français devaient lutter contre leur propre impérialisme, qui disposait d’un Empire Colonial conséquent. En 1921, est fondé l’Union Intercoloniale notamment avec Nguyen-Ai-Quac (le futur Ho Chi Minh), regroupant des travailleurs venant d’Asie et d’Afrique du Nord majoritairement. La même année, éclate la Guerre du Rif, menée par Abdelkrim, contre les Espagnols puis les Français à partir de 1925. Le Parti Communiste Français va lancer des grandes campagnes anti-militaristes et anti-impérialistes, en faveur de la guerre menée par Abdelkrim :appel à la grève générale, propagande dans les casernes, télégrammes de soutien aux insurgés, etc. En 1926 naît à Paris l’Etoile Nord-Africaine, l’une des premières organisations nationalistes algériennes, appuyée par le Parti Communiste. En 1924 déjà, le PCF avait présenté Hadjali Abdelkader aux élections parlementaires. Cette période est caractérisée par une lutte forte contre l’impérialisme français et en faveur des luttes de libération nationale et anticoloniales.
Cependant, la ligne du Parti Communiste n’est pas la plus claire à l’approche des années 30 et le sera encore moins lors de la constitution du Front Populaire en 1936. Se mettant à la remorque de la SFIO, les communistes vont abandonner le principe de toute lutte pour l’émancipation de l’Algérie, car les socialistes ont clairement montré leur refus d’union avec les communistes si ces derniers ne changeaient pas leur ligne vis à vis des colonies. L’on peut également dénoter quelques relents de social-chauvinisme, notamment quand il s’agit de la formation politique et idéologique des ‘indigènes’, qui n’est pas une priorité et laissée à des cadres de la métropole jugés plus ‘sûrs’. La période de la seconde guerre mondiale montrera encore un peu plus la refus du PCF de vouloir se placer sur une lutte anti-impérialiste : sur la question de l’Algérie et de l’Afrique en général, il se range sur la conférence paternaliste de Brazaville faite par De Gaulle, demandant une extension des droits et une égalité politique et sociale, mais rien de plus. Sur la question Indochinoise, la fébrilité du PCF se fait également ressentir, le nom de Ho Chi Minh n’apparaissant qu’assez rarement dans les colonnes de l’Humanité. Il faudra attendre la Guerre d’Indochine, qu’il y ait de violentes luttes des dockers contre l’envoi de soldats et de matériel jusqu’en Indochine ainsi qu’une répression terrible, pour que le PCF reprenne son caractère et des discours clairement anti-impérialistes et anti-colonialistes.
A la sortie de la guerre, le PCF tombe encore plus dans le social-chauvinisme en faisant de la lutte contre le Plan Marshall une priorité, pour « éviter que la France ne devienne américaine ». Bien que la lutte contre l’impérialisme américain soit une constante, le fait de reléguer la France comme ‘victime’ de l’impérialisme américain démontre une grande incompréhension sur les rapports inter-impérialistes au début de la ‘Guerre Froide’. Le chauvinisme du PCF se fait de plus en plus jour quand Maurice Thorez déclare que l’indépendance de l’Algérie la ferait tomber dans le giron de l’impérialisme américain ! Il y a une défense de l’Union Coloniale, qui serait une protection qui permettrait petit à petit à l’Algérie, aidée par la « Grande Métropole », d’accéder à l’indépendance. N’oublions pas que lors du massacre de Sétif du 8 mai 1945, le PCF vitupérait les « agents hitlériens du Parti du Peuple Algérien » (sic !). La dernière grande lutte anti-coloniale menée par le PCF reste lors de la Guerre d’Algérie. Mais au cours de cette dernière, le PCF aura une position clairement tiède, préférant des actions légales et s’en prenant aux actions individuelles du FLN. Les actions légales (manifestations, réunions, etc.) exposent d’ailleurs les militants à une répression féroce, comme ce fut le cas à Charonne le 8 février 1962. En conclusion, l’on peut noter que le PCF a eu une ligne changeante et de nombreux revirements sur la question coloniale et sur l’impérialisme, malgré la sincérité du combat de ses militants quand ce fut le cas.
2. Les interventions récentes
En Côte d’Ivoire, les interventions militaires de 2002 et de 2010 avaient pour objectif de ne pas laisser échapper le pays des griffes de l’impérialisme français. Tous les secteurs économiques sont dominés par l’impérialisme français et ce n’est pas un hasard s’il y a une base militaire française permanente à Abidjan et un accord de défense en cas de « déstabilisation » du pouvoir (c’est-à-dire une déstabilisation des intérêts français).
En 2000, Gbagbo est élu président. Sans s’opposer directement aux intérêts français, il fait marcher la concurrence et se tourne vers la Chine, l’Inde et l’Iran. C’est sous sa présidence qu’ont lieu des mouvements antifrançais.
En 2010, Gbagbo est réélu face à Ouattara. La France intervient sous des prétextes humanitaires (comme d’habitude !) et détruit l’aviation de l’armée ivoirienne, s’empare de Gbagbo et met en place Ouattara. Ce dernier est un pro-français et a renforcé la domination de l’impérialisme français en Côté d’Ivoire en mettant en place des experts et des conseillers français pour restructurer l’Etat et par des dédommagements aux entreprises et de très nombreux contrats juteux.
En Libye, en 2011, il s’agissait de s’accaparer les ressources pétrolières du pays, ainsi que les contrats de reconstruction. Encore une fois, cette intervention s’est faite au nom de la « démocratie » (sic !).
Ainsi, Libération avait révélé un document du CNT libyen évoquant la signature d’un accord « attribuant 35 % du total du pétrole brut aux Français en échange du soutien total et permanent à notre conseil ».
Alain Juppé avait alors affirmé « Le CNT a dit très officiellement que dans la reconstruction, il s’adresserait de manière préférentielle à ceux qui l’ont soutenu, ce qui me paraît assez logique et juste ». « On nous a dit que cette opération en Libye coûte cher, mais c’est aussi un investissement pour l’avenir. »
Au Mali, depuis 2013, l’intervention militaire a eu pour objectif le contrôle de zones stratégiques pour accaparer les ressources du sous-sol saharien, notamment l’uranium du Niger. La lutte contre les terroristes agissant soi-disant au nom de l’islam est un bon alibi pour l’impérialisme français mais tombe vite lorsque l’on voit qu’il les a soutenu en Syrie. D’ailleurs, les armes des terroristes au Mali proviennent en grande partie de Libye, des alliés français lors de l’invasion.
La question sous-jacente à l’intervention était celle de la stabilisation de la région.
Premièrement afin que les intérêts français soient protégés et puissent se développer, notamment les projets d’investissement d’Areva au Niger qui étaient retardés par la déstabilisation de la région, les prises d’otages et enlèvements de travailleurs d’Areva. Le Niger représente plus d’un tiers de l’uranium pour le nucléaire français.
Deuxièmement, parce que même si le Mali n’est pas directement de première importance économique pour l’impérialisme français, c’est tout de même le troisième pays d’Afrique producteur d’or et il y a de l’uranium dans son sous-sol qui n’est pas encore exploité (un gisement de 12 000 tonnes !).
Troisièmement, le Mali est un carrefour entre la Mauritanie où Total exploite le pétrole, l’Algérie qui a pour premier partenaire commercial la France, la Côte d’Ivoire et le Niger (uranium et minerais rares).
Ce n’est pas pour rien si l’intervention Serval au Mali s’est transformée en une intervention « régionale » nommée Barkhane qui s’articule autour de 4 pôles : Gao, au Mali, N’Djamena, au Tchad, Niamey, au Niger, où sont basés les drones et les Mirage 2000D de l’armée de l’Air et Ouagadougou, au Burkina Faso, s’étendant jusqu’en Mauritanie, avec des bases arrières à Dakar, au Sénégal, à Abidjan, en Côte d’Ivoire et à Libreville, au Gabon. Le poste de commandement inter-armée de cette opération de 3000 militaires est basé à N’Djamena.
En Afghanistan, en 2001, la France est intervenue militairement dans le cadre de la Force Internationale d’assistance et de sécurité mandatée par le Conseil de Sécurité de l’ONU sous commandement de l’OTAN et dans le cadre de l’Opération Enduring Freedom sous commandement militaire des Etats-Unis. A l’époque, la France n’avait pas encore réintégré l’OTAN puisque c’est Sarkozy qui l’a décidé en 2007, effective en 2009. Ce n’est qu’en 2012 que le retrait des troupes a été décidé et commencé.
Les ingérences de l’impérialisme français sont nombreuses. Nous allons surtout voir celle récente en Syrie.
La Syrie est un pays carrefour, stratégique pour l’acheminement des ressources pétrolières et gazières du Moyen-Orient vers l’Europe. D’autre part, c’est un pays allié de l’Iran, qui est un autre pays stratégique et opposé à l’impérialisme américain et européen. Les deux pays sont également opposés à l’Etat sioniste et colonisateur d’Israël. La Syrie est donc l’étape préliminaire à l’Iran pour que les impérialistes américains et européens puissent asseoir un contrôle plus important sur le Proche et Moyen-Orient.
Si la mobilisation était bien populaire au début du conflit, les impérialistes s’en sont servis comme prétexte pour prendre la main dans l’opposition au régime de Bachar al Assad. Ils financent et envoient des armes aux « terroristes » alors que se sont les mêmes qu’ils combattent au Mali. La Syrie est donc devenue un champ de bataille inter-impérialiste aiguë entre d’un côté le bloc UE-Etats-Unis et de l’autre le bloc Russie-Chine.
Aujourd’hui, la question de la Syrie est complexe. Dans cette situation, il faut soutenir le mouvement ouvrier et populaire et montrer la situation telle qu’elle est pour favoriser l’émergence d’une force politique révolutionnaire indépendante. Dernièrement, le mouvement kurde semble être une force importante dans l’opposition aux groupes réactionnaires, mais en même temps, certaines composantes ne rechignent pas à s’allier aux différentes puissances impérialistes.
L’impérialisme français c’est également les dernières colonies : Mayotte, la Réunion, la Guadeloupe, la Martinique, la Guyane, la Nouvelle-Calédonie, la Polynésie, Saint-Pierre-et-Miquelon, Wallis-et-Futuna et les terres australes et antarctiques. Leur importance est économique en augmentant considérablement les côtes du « territoire » français et ouvrant ainsi de bien plus grandes zones de pêche, mais c’est aussi la possibilité d’avoir une présence stratégique aux quatre coins du globe.