Notre lutte en Afghanistan fait partie de la lutte internationale des oppriméEs
Parti Communiste (maoïste) d’Afghanistan
2012
Les Camarades du PCR-Canada ont organisé un meeting autour de la venue d’un Camarade du Parti Communiste (maoïste) d’Afghanistan. Voici la traduction de son intervention soulignant la nécessité de la lutte anti-impérialiste portée par un mouvement de masse et dirigée par un Part, ainsi que la nécessité d’un nouveau regroupement international.
PC maoïste de France
En Octobre 2001, lorsque la coalition impérialiste menée par les Etats-Unis a lancé sa guerre d’agression pour envahir et occuper l’Afghanistan, les impérialistes ont proclamé que l’objectif de leur guerre était la traduction en justice des auteurs présumés des attentats sur le World Trade Center et le Pentagone. Mais plus important encore, ils ont également déclaré que leur guerre libérerait le peuple afghan, en particulier les femmes afghanes, et que l’occupation impérialiste allait promouvoir la démocratie et un projet de construction de l’Etat qui serait favorable aux droits de l’homme, aux droits des femmes et à d’autres valeurs de la démocratie libérale. Il ne fait aucun doute que ces promesses signifiaient en pratique et en théorie un appel à de nombreuses forces bourgeoises et petites-bourgeoises ainsi qu’aux intellectuels de notre pays, y compris les éléments qui se prétendent de gauche.
Dans cet exposé, je vais essayer de dégager les positions prises par les différents camps qui se réfèrent à des valeurs de gauche et s’en revendiquent. Nous pouvons diviser la gauche en Afghanistan en trois camps : le premier camp est le signe avant-coureur d’un capitulationnisme national – capitulards se prétendant de gauche ou de gauche libérale- ; le deuxième camp, nous le qualifions de semi-capitulard ou partiellement capitulationniste, et le troisième camp est le camp de la gauche anti-impérialiste et internationaliste. (Il est important de noter que ces trois camps se revendiquent du mouvement maoïste de la génération précédente.)
e camp des capitulards se compose d’anciens membres et de cadres du Mouvement de Nouvelle Démocratie sous la direction maoïste des générations passées. En privé et parfois même publiquement, ils prétendent encore être les fiers héritiers du glorieux mouvement maoïste d’Afghanistan. Ils jouent un rôle très important pour le régime fantoche et l’occupation impérialiste, siégeant en tant que cadres intellectuels et politiques du régime fantoche et de l’occupation impérialiste. Ils sont membres du parlement, ils sont ministres dans le gouvernement, ils sont de proches et importants conseillers du président, ils sont en charge des nombreuses ONG et des organisations de la soi-disant société civile, ils sont largement présents dans les médias … Bref, ils assument le rôle de « légitimation » du régime fantoche.
On peut en gros résumer comme suit l’argumentation de ce camp, sa compréhension de l’histoire politique de l’Afghanistan : l’histoire du pays a été l’histoire de la contradiction entre les forces de la modernité et les forces de la tradition, et c’est toujours cette même contradiction qui est à l’œuvre et modèle la politique actuelle de l’Afghanistan. Selon cette interprétation, il y a d’un côté les forces de la tradition sous la forme de l’islamisme des talibans (incarnant la pire espèce des valeurs féodales, le machisme, le chauvinisme national, le rejet d’absolument toutes les valeurs démocratiques et modernes), et de l’autre côté la «communauté internationale» qui tente de promouvoir l’instauration de la démocratie et la construction d’un l’Etat favorable aux valeurs modernes / libérales / démocratiques, dans des circonstances très difficiles. Par conséquent, ceux qui sont dans le camp capitulard croient qu’il est de leur devoir en tant que « progressistes » de se tenir aux côtés des forces de la modernité, c’est à dire, de l’occupation impérialiste et du régime fantoche.
Ces libéraux de gauche de l’Afghanistan moderne sont les fantassins intellectuels de l’occupation impérialiste. Ils se sont révélés être des partenaires les plus cohérents et les plus fiables de l’occupation impérialiste, et même plus encore que l’aile islamiste du régime fantoche dirigé par Hamid Karzaï.
Le deuxième camp, ceux que j’ai appelés semi-capitulards, est un autre camp très large composé de plusieurs groupes d’organisations réformistes de gauche. Leurs prétentions à se revendiquer de la gauche sont parfois plus marquées que celles du premier camp. A l’origine, il était très difficile de tracer une ligne de démarcation entre ces deux camps. En effet, au début de l’occupation, les principales cibles d’attaques politiques du camp semi-capitulard étaient des tendances spécifiques de la présence islamiste dans le régime fantoche ainsi que la force externe (ex: « les seigneurs de la guerre », « terroristes talibans »). Leur seul vrai problème avec l’occupation impérialiste était qu’ils avaient mis « les méchants » au pouvoir – les seigneurs de la guerre, les fondamentalistes islamiques, des moudjahidines, ex-talibans, etc.- et que, par conséquent, les occupants n’avaient aucune politique anti-intégristes cohérente. Le résultat de ce raisonnement c’est que, si « les bons » : eux-mêmes et les libéraux de gauche – avaient été mis au pouvoir par les impérialistes, l’occupation n’aurait pas fait problème. En quelque sorte, l’impérialisme serait une bonne chose s’il avait mieux choisi son gouvernement de marionnettes.
Un exemple paradigmatique du camp semi-capitulard est l’Association Révolutionnaire des Femmes d’Afghanistan [RAWA], une organisation qui définit ses activités selon le raisonnement ci-dessus. Maintenant, après dix ans d’occupation impérialiste qui ont ravagé l’Afghanistan, ils ont légèrement modifié la rhétorique de leur discours. Après des années de refus d’utiliser le mot « occupation », voilà qu’ils l’utilisent par ci par là. A différents niveaux et degrés, ils adoptent une position politique anti-occupation très discrète. Ils n’en restent pas moins cependant des semi-capitulards parce qu’ils continuent à placer sur le même plan les talibans et les occupants impérialistes comme ennemi principal. Ils affichent leur mépris envers l’appel à la résistance armée contre l’occupation. Pour la plupart, ils sont coincés dans le discours de pacifisme réformiste bourgeois et de parlementarisme. Cette position, dans le contexte d’une occupation impérialiste, revient en fait à fournir un soutien tacite au projet des occupants impérialistes. Il convient de noter que le discours de ce camp est en quelque sorte prolongé et amplifié par la gauche social-démocrate et réformiste dans le mouvement anti-guerre des pays impérialistes. Malheureusement, à plusieurs reprises, les communistes révolutionnaires ont également promu le projet semi-capitulard.
Le troisième camp, et la principale force anti-impérialiste en Afghanistan, c’est la gauche internationaliste anti-impérialiste. Ce camp se compose de plusieurs groupes et organisations marxistes-léninistes-maoïstes, mais c’est le Parti Communiste (maoïste) d’Afghanistan [PC(m)A] qui est la force principale et la plus importante avec plusieurs organisations de masse sous sa direction. C’est elle qui rassemble une résistance révolutionnaire anti-impérialiste dans le pays depuis le début de la guerre d’agression et de l’occupation de l’Afghanistan. Ce camp et le PC(m)A ont une analyse anti-impérialiste de la guerre contre notre peuple et l’occupation de notre pays : il identifie la contradiction principale en Afghanistan comme la contradiction entre les peuples de l’Afghanistan et les forces impérialistes d’occupation. Ainsi, le PC(m)A appelle à une guerre révolutionnaire de résistance populaire contre l’occupation impérialiste. Il convient de noter que, dans une perspective d’analyse de classe, nous ne considérons le mouvement des talibans que comme notre ennemi stratégique, mais, dans la conjoncture actuelle de l’occupation impérialiste, nous ne les considérons pas comme ennemi principal. Nous ne les assimilons pas au régime fantoche et aux forces d’occupation. Nous considérons l’occupation impérialiste et le régime fantoche comme l’ennemi principal du peuple d’Afghanistan. Par conséquent, l’occupant et son régime fantoche doivent être la cible principale de la guerre populaire révolutionnaire de résistance nationale.
Le PC(m)A a été fondé en 2004, constitué à la suite de l’unification d’organisations marxiste-léninistes-maoïstes importantes et plus anciennes : l’Organisation Révolutionnaire pour le Salut de l’Afghanistan, l’Alliance Révolutionnaire des Travailleurs d’Afghanistan et le Parti Communiste d’Afghanistan. En 2001, lorsque l’alliance américano-impérialiste dirigée par les USA a envahi et occupé l’Afghanistan, les forces et les organisations MLM en Afghanistan ont entamé un processus d’unification pour rassembler les communistes révolutionnaires en un seul parti dans le but de constituer une force de résistance révolutionnaire contre la guerre impérialiste et l’occupation. Le Mouvement Révolutionnaire Internationaliste (MRI) a joué un rôle important à l’époque dans la facilitation de ce processus d’unité entre les organisations MLM en Afghanistan. (Malheureusement, le MRI, à la suite de la ligne déviationniste au sein de son comité de direction, s’est effondré et est maintenant dans un état ??de complète paralysie.) Depuis l’époque de sa formation, le PC(m)A a été la principale force révolutionnaire laïque à résister à l’occupation. Sous sa direction, il existe plusieurs grandes organisations de masse des travailleurs, des femmes, des jeunes et des étudiants qui sont à l’origine d’un mouvement de masse anti-impérialiste dans le pays.
Bien que cette résistance révolutionnaire anti-impérialiste n’ait pas encore atteint le stade de la guerre populaire, les étudiants, les jeunes, les femmes et les mouvements de masse des travailleurs dirigés par le PC(m)A dans différentes parties du pays sont un pilier important de la résistance globale – la résistance principale de démocratie nouvelle, révolutionnaire, communiste – à l’occupation impérialiste. Maintenant le PC(m)A a affirmé dans ses récentes déclarations qu’il a amplifié la préparation pour déclencher la guerre populaire révolutionnaire de résistance nationale à l’occupation impérialiste.
Il est également très important de noter qu’il ne faut pas oublier la dimension internationale de la lutte en Afghanistan. Les puissances impérialistes menées par les Etats-Unis ont choisi l’Afghanistan comme principal champ de bataille pour leur projet de domination militaire de la planète. Par conséquent, elles ont des plans d’installation à long terme de bases militaires dans le pays – et, jusqu’à présent, il semble y avoir un consensus entre les puissances impérialistes sur la question de l’Afghanistan. Ainsi, c’est une coalition de 44 pays présents avec leurs forces armées en Afghanistan qui viennent appuyer le projet impérialiste américain et renforcer le régime fantoche. Et les puissances régionales réactionnaires qui n’ont pas une présence armée en Afghanistan ont d’autres rôles très importants en fournissant une assistance politique, diplomatique et financière à l’occupation et son régime fantoche. Le parapluie de l’ONU est l’expression de l’unité impérialiste et réactionnaire de puissances régionales internationales en ce qui concerne l’Afghanistan.
De même, l’insurrection des talibans islamistes bénéficie du soutien puissant, politique, militaire et financier des forces islamistes à travers le monde. Les talibans pakistanais, ainsi que d’autres forces islamistes de l’Asie Centrale, de la Chine et du Moyen-Orient apportent des ressources militaires ainsi qu’un soutien politique et financier au mouvement des talibans en Afghanistan. Il ne fait aucun doute que sans cette aide internationale islamiste, il serait très difficile pour le mouvement des talibans de se maintenir.
Cet état de choses international devrait expliquer pourquoi le PC(m)A s’intéresse beaucoup à l’évolution des choses au MRI et à la formation d’une nouvelle organisation communiste internationale. Nous croyons fermement que la lutte en Afghanistan et la révolution en Afghanistan s’inscrivent dans le cadre de la lutte mondiale et de la révolution mondiale contre le capitalisme et l’impérialisme. Etant donné que le MRI a contribué au processus d’unité des organisations MLM en Afghanistan (ainsi que dans d’autres pays), l’existence et les activités d’une nouvelle organisation communiste internationale, nous l’espérons, devrait avoir un rôle extrêmement important de soutien politique et idéologique aux luttes révolutionnaires en Afghanistan et ailleurs. Avec l’émergence de la ligne Avakianiste post MLM et la ligne révisionniste Prachanda-Bhattarai, le MRI s’est effondré. Avec la paralysie du MRI, nous pensons que la lutte révolutionnaire en Afghanistan a perdu une dimension importante et internationaliste.
À ce stade, travailler à la formation d’une nouvelle Organisation Internationale Communiste ou à réactiver notre organisation internationale dormante est la tâche principale internationaliste du mouvement communiste dans le monde entier. Ce serait l’expression concrète de la devise communiste « travailleurs de tous les pays unissez-vous ». A une époque où le système capitaliste impérialiste est en grande difficulté, ébranlé par des crises économiques et financières récurrentes et où les masses opprimées se lèvent pour lutter contre ce système en décomposition avancée, nous avons plus que jamais besoin d’une telle organisation internationale afin de lutter pour influencer ces mouvements et travailler à leur fournir une dimension révolutionnaire communiste.
Notre lutte en Afghanistan s’inscrit dans le cadre de la lutte mondiale des opprimés. Par conséquent, non seulement nous travaillons pour la révolution en Afghanistan mais nous jouons ainsi notre rôle internationaliste pour œuvrer à la formation d’une organisation internationaliste communiste.