La Lutte entre deux lignes dans le Mouvement communiste international

La Lutte entre deux lignes dans le Mouvement communiste international

Basanta

25 septembre 2011

   Le mouvement communiste international a traversé 162 années depuis que le Manifeste Communiste a été publié en 1848. Un bilan détaillé de ces 162 ans d’histoire des Partis communistes à travers le monde suffirait à remplir quelques gros volumes. Il est très difficile de condenser un aussi vaste sujet dans un article de deux ou trois pages. Ainsi, en nous centrant principalement sur des questions comme : que signifie une lutte entre deux lignes dans un Parti communiste ; où et comment s’est manifestée son expression centrale dans l’histoire du mouvement communiste, une brève discussion sera développée dans cet article. D’autre part, un effort sera fait pour dévoiler le contenu de l’actuelle lutte entre deux lignes dans notre Parti et expliquer en quoi elle n’est pas différente dans son contenu de toutes les luttes entre deux lignes menées dans le mouvement communiste international jusqu’à aujourd’hui.

   Une lutte entre deux lignes est une lutte politique et idéologique, qui se déroule entre une ligne marxiste et une ligne non-marxiste, c’est à dire bourgeoise, dans un Parti communiste. En d’autres mots, la lutte entre deux lignes est par essence une lutte entre deux voies, dans laquelle les uns s’efforcent d’appréhender fermement le marxisme afin de se diriger vers l’établissement du communisme, et les autres définissent le marxisme comme l’acceptation du besoin de réforme partielle dans le statu quo. La lutte de classe existe tant que les classes existent dans une société et elle se reflète dans la lutte idéologique au sein du Parti communiste. C’est la vie d’un Parti communiste. La base philosophique d’un Parti communiste est le marxisme. Et, comme le marxisme est une science en développement, le marxisme actuel est le marxisme-léninisme-maoïsme.

   Il y a un grand nombre de Partis communistes dans chaque pays, et chacun proclame être authentiquement marxiste. Dans notre pays aussi, un très grand nombre de Partis existe à ce jour. Il s’agit d’être bien clair sur le fait qu’untel ou untel est marxiste ou pas, et sur les critères pour être marxiste, nonobstant le fait de proclamer l’être. Le marxisme est une compréhension globale, et il a trois composantes. La première est la philosophie : c’est le matérialisme dialectique et historique. La seconde est le socialisme scientifique et la troisième est l’économie politique. La philosophie marxiste apporte une direction idéologique à la révolution prolétarienne. Le socialisme scientifique est le système politique de transition qui guide le processus entier de transformation du capitalisme en communisme. Enfin, l’économie politique marxiste demande l’établissement d’un mode de production socialisé à la place du capitalisme, afin de faire de chaque travailleur le propriétaire de son travail. Ce sont les questions fondamentales du marxisme. Dévier d’un seul de ces aspects, c’est prendre la voie du réformisme. Pour un réformiste, il est facile d’attaquer sur la méthodologie, mais il n’est pas aussi aisé d’attaquer sur les principes. Cela ne veut pas dire que les représentants bourgeois n’attaquent pas la philosophie marxiste. Actuellement, les révisionnistes attaquent principalement sur la lutte violente, qui joue un rôle essentiel pour établir un système socialiste, et la dictature du prolétariat, qui est nécessaire pour le défendre et le développer.

   Lénine, dans l’Etat et la Révolution, écrit : « Il est souvent dit et écrit que le point principal dans la théorie de Marx est la lutte des classes. Mais c’est faux. Et cette fausse notion aboutit très souvent à une altération opportuniste du marxisme et à sa falsification dans un esprit acceptable pour la bourgeoisie. Quant à la théorie de la lutte des classes, elle n’a pas été créée par Marx, mais par la bourgeoisie avant Marx et, en général, elle est acceptable pour la bourgeoisie. Ceux qui reconnaissent seulement la lutte des classes ne sont pas encore des marxistes ; ils peuvent toujours se trouver dans les limites de la pensée  et  de la politique bourgeoise. Limiter le marxisme à la théorie  de la lutte des classes signifie tronquer le marxisme, le déformant, le réduisant à quelque chose acceptable pour la bourgeoisie. Seul est marxiste celui-qui prolonge l’identification de la lutte des classes à l’identification de la dictature du prolétariat. C’est ce qui constitue la distinction la plus profonde entre le marxiste et l’ordinaire petit (aussi bien que grand) bourgeois. C’est la pierre de touche sur laquelle la compréhension réelle et l’identification de marxisme doit être évaluée« . La lutte entre deux lignes dans le mouvement communiste international s’est manifestée sous différentes formes, mais en dernière analyse, elle est centrée sur la question de soit avancer sur la voie de la révolution ininterrompue sous la dictature du prolétariat, soit suivre le chemin de la réconciliation de classe.

   En dehors de l’attaque révisionniste contre la dictature du prolétariat, nous avons également des attaques vigoureuses contre deux autres composants du marxisme. Sur l’unité et la lutte des contraires, le marxisme enseigne que la lutte est absolue et l’unité relative. Les révisionnistes ont attaqué sur cette notion. Au temps de la Révolution culturelle, un intellectuel chinois, Yang Hsien Chen, a mis en avant une conception éclectique de « deux se combinent en un » en opposition à la conception dialectique de « un se divise en deux ». Ceci s’oppose à la conception matérialiste dialectique que l’unité entre deux contraires est relative et la lutte entre eux est absolue. Le Parti communiste de Chine dirigé par Mao s’opposa fermement à cela. Il affirma que c’était la voie vers la collaboration de classe en lieu et place de la lutte des classes et de la dictature du prolétariat. En réalité, le principe selon lequel la l’unité entre deux contraires est absolue et la lutte est relative était la racine idéologique derrière la contre-révolution en Chine.

   Lorsque nous regardons en arrière, nous voyons que cette lutte a également eu lieu dans le mouvement communiste népalais. Au Congrès d’Unité de 1992, Ruplal Viswakarma a défendu la thèse que l’unité est absolue et la lutte relative. Là où cette conception l’a amené aujourd’hui est clair pour tout le monde. Héritage de cela, la conception de notre leadership qui envisage que la libération du Népal et du peuple népalais réside dans la fusion du matérialisme et de l’idéalisme l’a maintenant conduit à désarmer l’Armée populaire en remettant les clés des containers d’armes à la réaction. En plus de cela, le Premier ministre maoïste [Bhattarai NDLR] a maintenant ordonné à la police de restituer les terres aux grands propriétaires en les reprenant aux sans-terres et aux paysans pauvres qui les ont occupées grâce à la force de l’Armée populaire lorsque la Guerre populaire avançait. Ce ne serait pas une surprise si notre leadership, qui déclare aujourd’hui « martyrs » ces gens qui sont tombés des deux côtés pendant la Guerre, déclare demain « criminels » ces camarades révolutionnaires et disciplinés à qui il ordonnait de mener des actions contre l’ennemi de classe hier. L’idée selon laquelle nous devons travailler amicalement avec la classe dominante indienne pour défendre la souveraineté nationale du Népal est en train de devenir dominante dans notre Parti. C’est de la capitulation nationale. Tout cela est une expression de la collaboration de classe et sa base idéologique est l’éclectisme. La lutte entre deux lignes, qui se déroule dans notre Parti, est à son paroxysme aujourd’hui.

   L’usage de la force joue un rôle essentiel dans le transfert du pouvoir étatique d’une classe à une autre. C’est le premier point que Marx nous a enseigné sur comment prendre le pouvoir. Le second point est qu’un système de transition, qui existe pour une longue période entre capitalisme et communisme, est le socialisme et qu’il s’exprime sous la forme de la dictature du prolétariat. Mais les révisionnistes à travers le monde ont toujours attaqué l’essence même du marxisme. Leur cible, de Kautsky à Bernstein et de Khrouchtchev à Deng Xiaoping, a été d’attaquer la théorie de la violence révolutionnaire et de la dictature du prolétariat, et les révisionnistes aujourd’hui font la même chose. Khrouchtchev a attaqué l’usage de la force au nom de la transition pacifique et la dictature du prolétariat au nom de l’Etat « du peuple entier ». Durant le grand débat des années 70, Mao n’a pas seulement lutté idéologiquement contre le révisionnisme khrouchtchévien, mais a aussi déclaré que la lutte des classes existe tout au long de la période du socialisme. Dans ce contexte, Mao a mis en avant que, afin d’empêcher les agents bourgeois de prendre le pouvoir, le prolétariat devait continuer la révolution sous la dictature du prolétariat durant toute la période du socialisme. Ceci est connu comme la théorie de la révolution ininterrompue.

   Tout comme les révisionnistes d’autres pays, les révisionnistes du Népal se sont aussi opposés au rôle essentiel de la violence pour faire la révolution ainsi qu’à la dictature du prolétariat. Dans l’histoire du mouvement communiste au Népal, le révisionnisme a formellement son origine dans l’appel de Manmohan au Roi en 1957, dans lequel il dit qu’il propagera le socialisme pacifiquement. La lutte de classe révolutionnaire qui a commencé sous la forme de la Rébellion de Jhapa en 1972 a maintenant amené à une démocratie multipartite après que le PCN (ML) d’alors ait adopté formellement la ligne révisionniste khrouchtchévien de transitions pacifique. Le peuple népalais a pu voir que la grande Guerre populaire, initiée en février 1996, a amené de grands changements dans la société népalaise. Mais le peuple népalais n’a plus aujourd’hui le pouvoir populaire que les 10 années de Guerre populaire avaient établi. Les gouvernements populaires ont été dissous. Les armes qui avaient été acquises par le sacrifice de dizaines de milliers de vaillant-e-s fils et filles du peuple népalais ont été confinées dans des containers et leurs clés ont maintenant été remises entre les mains des réactionnaires. L’Armée Populaire de Libération (APL) construite soi-disant pour prévenir la contre-révolution et amener le peuple népalais au communisme est maintenant au seuil de la liquidation, au nom de l’intégration et de la réhabilitation. Cela a amené le peuple népalais dans la situation où Mao disait : « sans armée le peuple n’a rien ». Ce n’est pas qu’une question technique liée aux clés des containers, mais une question théorique. Cela montre comment le rôle de l’APL, mandataire du prolétariat pour prendre le pouvoir et poursuivre la révolution sous sa dictature, est nié. C’est du capitulationnisme de classe pur et dur.

   La lutte entre deux lignes au sein du Parti Communiste Unifié du Népal (maoïste) est maintenant centrée sur la question de maintenir l’APL avec ses armes et de l’intégrer pour former une armée nationale, ou de la reconvertir en gardes forestiers en la désarmant ; lutter pour établir la Nouvelle démocratie et le socialisme à travers la République populaire fédérale et lutter pour l’indépendance nationale ou s’agenouiller devant l’expansionnisme indien. Notre direction a capitulé devant l’ennemi en désarmant l’APL, et a violé le document de la réunion du Comité Central à Paris height. Dans ce document il est dit : « L’intégration de l’Armée et l’agenda de réhabilitation doivent être menés simultanément. Nous devons rester d’une totale vigilance contre les menées réactionnaires qui visent à affaiblir et désarmer notre Parti en intégrant et réhabilitant l’APL avant que la Constitution ne soit écrite ». Sous cet éclairage, bien que différent dans la forme, le contenu de la lutte entre deux lignes qui se déroule dans notre Parti en ce moment n’est pas différent de celui de la lutte entre marxisme et révisionnisme qui s’est déroulée au sein du mouvement communiste international par le passé.

   Le programme économique des révolutionnaires communistes est de mettre fin à la propriété privée des moyens de production et établir à sa place des rapports de productions socialisés. Cela résout la contradiction entre Capital et Travail qui existe dans la société capitaliste. Cependant, les agents bourgeois, qui pénètrent dans un Parti communiste, attaquent le mode de production socialiste et insistent sur le développement des forces productives. Le 8ème Congrès du Parti Communiste de Chine avait mis l’accent sur la nécessité de développer les forces productives, en affirmant que la contradiction entre les nécessités matérielles croissantes des masses populaires et le retard des forces productives était la contradiction principale en Chine. Les mots de Deng Xiaoping, « peu importe qu’un chat soit noir ou blanc pourvu qu’il attrape des souris », dévoilent que l’objectif était le développement du capitalisme. Au temps de la Grande Révolution Culturelle Prolétarienne, les révolutionnaires de Chine ont au contraire adopté pour politique de donner la priorité aux rapports de production socialisés, se basant sur le slogan : « Faire la révolution, promouvoir la production ».

   Sous la direction du prolétariat, le peuple népalais a participé à de grands mouvements de masse et aux dix années de la grande Guerre populaire de 1996 à 2006 en donnant un exemple éclatant de sacrifice. Dans ce processus, la monarchie féodale centralisée, qui a dirigé le Népal durant 240 ans, a pris fin. Certains leaders de notre Parti, qui considèrent cela comme l’accomplissement de la révolution politique, ont parlé d’aller à partir de là vers la transformation économique. Ceci est totalement erroné. Même si la monarchie a été abolie, le Népal est toujours un pays semi-féodal et semi-colonial. La révolution économique, que l’on dit pouvoir mener sur ce type de base socio-économique, ne saurait être que la croissance du capitalisme compradore et bureaucratique, pas du capitalisme national. Ce genre de développement économique ne peut rien faire d’autre qu’engraisser une poignée de bourgeois compradores et appauvrir le pays et le peuple tout entier. Par conséquent, la lutte entre deux lignes en cours dans notre Parti est centrée sur la lutte pour établir une République populaire fédérale afin de paver la voie au développement du capital national et ainsi bâtir les fondations de l’économie socialiste, ou, au contraire, introduire dans le jeu le capital financier des pays impérialistes, dans le statu quo, et ce faisant engraisser la bourgeoisie compradore.

   L’analyse qui précède clarifie que la lutte entre deux lignes se poursuit continuellement dans un Parti communiste, sur les contenus de la philosophie marxiste, du socialisme scientifique et de l’économie politique. Ceci vaut également pour notre Parti. Dans l’objectif de renforcer la base économique socialiste, le pouvoir prolétarien poursuit la révolution sous la dictature du prolétariat, sur la base du marxisme, et ce processus pave la voie vers le communisme. Les révisionnistes attaquent parfois le contenu de la philosophie marxiste, parfois sur la dictature du prolétariat et parfois sur l’essence de l’économie socialiste. La lutte entre deux lignes en cours dans notre Parti n’est pas éloignée de cela. Afin de vaincre le révisionnisme de droite et unir le Parti sur la base idéologique du marxisme-léninisme-maoïsme, un révolutionnaire maoïste doit défendre le matérialisme historique et dialectique, la révolution ininterrompue sous la dictature du prolétariat et l’économie socialiste. C’est la tâche historique de tout révolutionnaire au Népal d’accomplir la révolution de nouvelle démocratie et paver la voie vers le socialisme.